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— i38 - fait un continuel temps pluuieux, humide & froid fur ce grand Ban, aufli bien en plein Efté comme en autre faifon, & hors de là on voit un temps tout autre. Ces mauuaifesqualitez feroient fort ennuyeufes fi elles n’eftoient adoucies & compenfées par la récréation & le divertiifement de la pefche, qui vous donne d’un poilTon frais rauiflamment bon. i3p || Unechofe entr’autres me donnoitde la peine en mes indifpofitions, une grande enuie de boire un peu d’eau douce & nous n’en auions point, car la noftre s’eftoit corrompue & empuantie par la longueur du temps que nous eftions en mer, & fi ie ne pouuois ufer de cidre, ny de vin, non plus que beaucoup d’autres ra- fraifchifiemens, fans metrouuer mal du cœur qui m’eï- toit comme empoifonné& fouuent bondiffant contre les meilleurs viandes, eftre couché ou affis me donnoit quelque allégement lors que la mer n’efloit point trop haute, maiseftant fort enflée nous eftions bercez d’une merueilleufe façon. O que ie trouuois les Mattelots heureux d’auoir toufiours bon appétit, eftre gays & ioyeux, & ne fentir point ces bondifl'antes & empoi- fonnées douleurs du cœur. Douze ou quinze lieues de chemin apres auoir palfé le grand Ban, nous rencontrâmes le Ban-Auert, ainfi nommé (médirent les Mariniers) pour ce qu’aux mo- luës qu’on y pefche, il s’y trouue des petits boyaux qui remuent comme vers que ie voulu voir moy-mefme, pour en pouuoir parler auec expérience ; & remarquay de plus, que ces moluës ont ordinairement une peau noire en dedans, & ne font fi bonnes ny fi excellentes que celles du grand Ban.