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— 134 — milliers que les Romains les entassaient sur les bords des grandes routes, surtout à l’approche des -villes. La voie Appienne, entre autres, avait le privilège d’être à la mode et de compter le plus grand nombre de mausolées. Ce qui en reste, de nos jours, élonne le voyageur, autant par sa magnificence que par sa quantité; et les deux heures que j’ai passées au milieu de tous ces tombeaux m’ont révélé tout ce qu’il y a de vain et de fragile dans les plaisirs et les grandeurs du monde. — Sic transit gloria mundi ! Les chrétiens avaient aussi leurs cimetières sur la voie Appienne ; car on y retrouve l’entrée de deux catacombes ; celle de Saint-Calixte et celle de Saint-Sébastien. A vrai dire, les chrétiens avaient leurs catacombes partout, attendu que ces souterrains, qui leur servaient, tout à la fois, de cimetières et de lieux de refuge, régnent sous toute une partie de la ville et forment, dans la campagne ro maine, un immense réseau, s’étendant à plusieurs lieues et environnant de toute part l’ancienne capitale du monde païen, comme des tranchées stratégiques, destinées à faire le siège régulier de la cité des Césars. C’était là, dans les entrailles de la terre, que les chrétiens persécutés inhu maient leurs morts au lieu de les brûler; et ces morts étaient, presque tous, des martyrs dont les corps étaient souvent rachetés, au prix de l’or, des mains des bourreaux qui les avaient si cruellement mutilés. On les enfouissait à la hâte dans des niches oblongues, creusées par les fos soyeurs dans les parois de pouzzolane qui formaient les deux côtés de la galerie souterraine. L’ouverture de ce sépulcre, appelé loculus, était soigneusement refermée par une tablette de marbre, scellée avec le ciment le plus dur, et sur laquelle on inscrivait le nom du martyr et le jour de sa mort, lorsqu’on en avait le temps. Une fiole, renfer mant le sang de la victime, était placée au-dessus de ce tombeau, comme pour indiquer la sainteté des reliques qu’il avait reçues en dépôt, jusqu’au jour de sa glorifica tion sur nos autels, ou jusqu’à celui de la résurrection générale. Souvent, quand ces galeries étaient pleines, les chrétiens les recomblaient avec les terres, extraites de nou-