202 un petit morceau de poifton boucanné à chacun, cuit en l’eau, car c’eft tout la fauce du pays, & mes fezolles nous feruirent pour le lendemain : dès lors ie trouuay bonne la Sagamité qui eftoit faite dans noftre ca bane, pour eltre allez nettement accommodée, ie n’en pouuois feulement manger lorfqu’il y auoit du poif- fon puant demincé parmy, ou d’autres petits, qu’ils appellent Auhaitfique, ny aufli de Leindohy, qui eft un bled puant, duquel ils font neantmoins grand eftat : nous mangions par fois des citrouilles du pays, cuites dans de l’eau, ou bien fous les cendres chau des, que ie trouuois fort bonnes, comme femblable- ment des efpics de bled d’Inde que nous faifions rof- tir deuant le feu, & d’autres efgrenez, grillez comme pois dans les cendres: pour des meures champeftres 211 noftre Sauuageffe m’en ap- || portoit fouuent au ma tin pour mon defieuner, ou bien des cannes d’hon- nehaàfuccer, & autre chofe qu’elle pouuoit: & auoit ce foin de faire dreffer ma Sagamité la première, dans l’efcuelle de bois ou d’efcorce la plus nette, large comme un plat baftin, & la cueillier auec laquelle ie mangeois, grande comme une fauciere, & longue comme une à dreffer potage. Pour mon departement & quartier, ils me donnè rent à moy feul, autant de place qu’en pouuoit occu per un petit mefnage, qu’ils firent fortir à mon occa- fion, dés le lendemain de mon arriuée: en quoy ie re- marquay particulièrement leur bonne affeétion, & comme ils defiroient en tout de me contenter, & m’af- fifter auec toute l’honnefteté & le refpect deu à un grand Capitaine & chef de guerre tel qu’ils me te-