— 197 — agréable ma maniéré de procéder, & d’excufer fi pour mieux faire comprendre l’humeur de nos Sauuages, i’ay efté contraint d’inferer icy plufieurs chofes qui fembleront inciuiles & extrauagantes, d’autant que l’on || ne peut pas donner une entière cognoiffance 2o5 d’un pays effranger, ny ce qui eft de fon gouuerne- ment, qu’en faifant voir auec le bien, le mal & l’im- perfeélion qui s’y retrouue: autrement il ne m’euft fallu defcrire les mœurs des Sauuages, s’il ne s’y trouuoit rien de Sauuage, mais des mœurs polies & ciuiles, comme les peuples qui font cultiuez par la Religion & pieté, ou par des Magiffrats & Sages, qui par leurs bonnes loix euffent donné quelque forme aux mœurs fi difformes de ces peuples barbares, dans lefquels oh void bien peu reluire la lumière de la rai- fon, & la pureté d’une nature efpurée. Deux iours auant noftre arriuée aux Hurons, nous trouuafmes la mer douce, fur laquelle ayans trauerfé d’Isle en Isle, & pris terre au pays tant defiré par un iourde dimanche fefte fa inet Bernard, enuiron midy, que le foleil donnoit à plomb: le me proflerné de- uant Dieu, & baifé la terre en laquelle ce Souuerain Monarque m’auoit amené pour annoncer fa parole & fes merueilles à un peuple qui ne le cognoiffoit point, & le prié de m’affifter de fes grâces, & d’eftre par tout mon guyde pour faire toutes chofes félon fes di- uines volontez, & au falut de ce peuple; puis mes Sauuages ayans ferré leur canot dans un bois qui ef- toit là auprès, me chargèrent de mes hardes & pac- quets qu’ils auoient toufiours auparauant portez par les Sauts, car la longue diflance qu’il y auoit de là au