|| On me pourra dire que ie devois auoir emprunté xiv une plume meilleure que la mienne pour polir mes efcrits, & les rendre recommandables, mais c’eft de quoy ie me foucie le moins, & vous affeure que quand bien ie l’aurois pu faire ie ne l’aurois pas fait, car il n’eft pas raifonnable qu’un pauure frere mineur comme moy, fe pare des riches threfors de l’eloquence d’autruy, & puis ie n’ay pas entrepris de contenter les amateurs de beaux difcours, mais d’edifier les bonnes âmes qui verront en cette Hiftoire une grande exemple de patience & modeftie en nos Sauuages, un cœur vrayement noble, & une paix & union admira ble, car que feruent tant de mots nouueaux & inuentez à plaifirfinon pour uider l’ame de la deuotion || & la xv remplir de vanité. Il n’y. a pas iufques à de certaines deuotes & de petites feruantes de léfus-Chrift, qui veulent pindarifer & faire les fçavantes en matière de bien dire. Il vaudrait bien mieux, difoit fai nete The- refe, qu’elles ufaflent du langage des hermitrelles, fceuffent peu parler & bien operer, que de s’amufer à ces cajoleries ou difcours affetez. On demanda un iour à Demofthenes par quel moyen il efloit plus excellent que les autres en l’art de bien parler, ilrefponditen confommantplusd’huyle que de vin. le pourrais rendre la mefme refponce à ceux qui m’interrogeraient du moyen d’auoir pu tra- uailler à mon Hiftoire, eftant fi occupé d’ailleurs en d’autres commiffions. Que la lampe m’a feruy || de xvi Soleil, & qu’a peine fes rayons m’ont ils veu compo- fer mes efcrits qui portent le pardon de mes fautes s’il s’en trouue dans le corps de ce Liure, car il eft