— i66 — Il eft pourtant neceffaire, & toutes les autres na tions Chreftiennes qui ontfubiugué des pais infidelles l’ont ainfi pratiqué, que les peuples que l’on veut inftruire en la Loy de Dieu, foient réduits à viure en- femble en baftiffans des bourgs, villes & villages fous de bons Chefs, autrement comment voudraient ils qu’on les rendit iamais Chreftiens, les Religieux peu- uent-ils toufiours courir auec eux Hyuer & Efté, les bois & les montagnes, & quelques fois en des pays fort esloignez, chargez de leurs ornemens & petites 170 commoditez, ce ferait vouloir rendre || les Religieux autant Saunages que les Sauuages mefmes, & s’ils ne pourraient iamais longtemps perfeuerer dans cette fatigue, ny les Sauuages deuenir gueres autres que toufiours barbares, les Religieux les venans à quitter, puis que les François mefmes, mieux inflruits & esle- uez dans l’Efcole de la Foy,deuiennent Sauuages pour li peu qu’ils viuent auec les Sauuages, & perdent pref- que la forme du Chreftien, fi cela eft, comme il eft vray femblable, pourquoy voudrait on que l’on ha- fardat imprudemment le faint Baptefme à des per sonnes qu’on fçait affeurement (eftans errans comme ils font) qu’ils ne pourraient viure en Chreftiens, l’ex- perience nous la * fait voir en ce que la plufpart des Sauuages que nos Freres ont baptifez en Canada, & puis renuoyez hyuerner entre leurs parens poury pro fiter, y ont au contraire prefque oublié la pratique du Chreftien, & fuffent deuenus derechef Sauuages fans le foin que l’on a pris de les redrefler : Et c’eft pour quoy ie dis que l’on ne fera iamais grand profit, ii on ne fuit noftre premier defl'ein, qui eft de les rendre