— io5 — coucher fans foupper pour n’y auoir ni poifïbn ny caftor pour les regaler, la chair d’Eslan dont ils auoient à foifon n’eflant pas pour pareil iour. Le matin venu rien ne les empêcha de s’efueiller que le trauail du chemin qui les auoit un peu affou- py & appefanty. Apres qu’ils eurent prié Dieu, les Sauuages leur donnèrent à chacun un morceau de la belle qu’ils accommodèrent à part, chacun dans unmorceaudelapeau & des vieillescouuertures qu’ils auoient apportées, puis ayant proprement liez leur * pacquets, chacun traifna le fien auec une corde par- deffus les neiges, qui eft une bonne inuention || car de i o3 les porter fur le dos il eut eflé bien difficille & quafi impoflible. Si le temps n’euft point changé, ils n’euffent eu que demy mal, mais quatre ou cinq heures après qu’ils furent partis, il s’esleua un fi grand vent auec des pluyes fi fafcheufes qu’elles leur gallerent tout le che min; puis lanuiét furuenant il leur fallut loger em- my les bois dans un trou qu’ils firent au fond des neiges, où ils auoient l’eau qui les incommodoit au tant que la pluye qui faifoit fondre la neige; pour leur repas ils eufient bien pû cuire de la viande, mais ils n’auoient ny pain ny fel, & mouraient de froid; de maniéré qu’ils pafi'erent la nuiél fort efueillez, & dans un extreme foucy comment ils pafleroient le lendemain la riuiere qui commençoit à lafcher, &les neiges à fondre, ce qui rendoit le chemin prefque infupportable à gens chargez, & fi mal accommo dez. Ils n’eurent pas à peine pafl'é celle riuiere qui con-