— 397 — auions quitté un tres-bon pais & trauerfé tant de mers & de terres auec infinis dangers & mefays pour leur venir annoncer la parole de Dieu, le che min du Ciel, & retirer leurs âmes de la domination de Loxi, qui les entrainoit tous apres leur mort dans un abifme de feu foufterrain, puis pour les rendre amis & comme parens des François qui les cherif- foient, & neantmoins qu’il y en auoit entr’eux qui auoient voulu tuer noftre frere Jofeph, particulière ment un tel que nous nommafmes. Quoy, leur dis-ie, pour leur faire admirer la bonté & les richelfes de la France, & leur ofter l’opinion que les leurs ayent alléchez les François, nous man gions de la grailfe à plain foui, car c’eft là leur plus friant morceau. Les outardes, les grües & les perdrix, nous efloient tellement communes, que cela ne nous eftoit non plus efpargné qu’à vous le bled d’Inde. Les pauures mefmes ne veulent point manger de la chair de nos chiens. Nos maifons font bafiies || non d’ef- q3o corces & de bois comme les voflres ; mais de pierres & matériaux folides. Les champs font tous femez de bon bled, de bonnes prunes & de racines excellentes, voudriez vous croire à prefent que nous foyons venus chercher à difner à vos portes, & que la neceflité nous ait porté à un fi miferable pais, defnué de toutes dou ceurs, comme vous aduoüez vous mefmes, puifque nous eftions fi fort à noftre ayfe & que toutes chofes nous venoient à fouhait, ayez donc de l’amitié pour nous, puis que l’amour que nous auons eu pour vous, nous a fa ici quitter tant d’ayfe & de contentement, & faict ieufner fort aufterement en procurant le falut de vos âmes.