236 DEUX ANS EN AFRIQUE deux ou trois fois seulement, au milieu de la plaine, nous vîmes des caravanes de chameaux conduites par quelques nègres, lesquels, montés et accroupis sur le dos de ces animaux au pas cadencé, ressemblaient à des naufragés ballottés dans de petites embarcations sur une mer agitée. Le soir, vers six heures, des vignes et des plantations de figuiers nous annoncèrent le voisinage de Mascara. Nous traversâmes les jardins qui entourent la ville. Nous laissâmes à gauche la vieille ville de Sidi-Baba-Ali, tout en ruines, qui n’est habitée aujourd’hui que par quel ques Arabes. A droite, au-dessous de nous, se dessinait la riche et belle plaine d’Eghris, et devant nous s’élevaient les murailles blanches de Mascara, auxquelles le soleil couchant imprimait une légère teinte rosée. A ce moment, et comme le soleil allait disparaître à notre horizon de droite, nos Arabes d’escorte montèrent précipitamment sur un petit plateau, mirent pied à terre, et se tournant vers le couchant, ils élevèrent leurs mains au-dessus de leur tête, et récitèrent des prières à haute voix. Ce n’était pas la première fois que je voyais les indi gènes, au coucher comme au lever du soleil, rendre hommage au Créateur; mais, soit l’état maladif dans le quel je me trouvais, soit la décoration sublime qui se déroulait devant nous, le fait est que je ne fus jamais si vivement impressionné. 11 y avait quelque chose de pri mitif et de touchant dans cette sorte d’action de grâces rendue par le voyageur à l’astre qui l’a guidé au milieu du désert. Peu de temps après, nous traversions les faubourgs de Mascara. Les ruines de l’ancienne ville font place à des constructions nouvelles. Des bâtiments considérables des tinés à la cavalerie et à l’infanterie s’élèvent à l’entrée