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— 8 — est d’usage consacré par la jurisprudence que les photographes conser vent toujours les clichés de leurs œuvres, portraits ou travaux quel conques. Ce droit de propriété du cliché consiste en ce que le profes sionnel peut ne délivrer que le nombre de photocopies stipulé, avec son client et s’opposer à toute contrefaçon. Il y a tendance à confondre le droit du photographe sur son œuvre et celui du professionnel sur son cliché, puisque l’image photogra phique est une épreuve du cliché, auquel elle ressemble « comme la médaille à la matrice » ; mais il n’y a pas identité juridique. Abolir ce droit de l’opérateur sur son phototype négatif, c’est tolérer les multiplications indues des photographies obtenues d’après un cliché, et permettre les contrefaçons directes ou indirectes, puisqu’à l’aide d’une épreuve, quiconque pourra faire un nouveau cliché, semblable au premier et générateur de photocopies. Mais quelle est la nature et l'étendue du droit du photographe sur son cliché représentant un portrait, en présence du droit absolu de la personne photographiée sur son être et son visage ? Sera-ce un droit entier, absolument privatif qui, comme conséquence, entraînera celui d’exposition et de reproduction ? Ou ce droit n’est-il pas, au contraire, primé et limité par celui du modèle sur ses traits, droit imprescriptible et inaliénable? La question est plus simple qu’elle ne le paraît tout d’abord, et il est facile de concilier, sans les altérer, ces deux droits rivaux. Il semble tout d’abord que le droit de propriété sur un cliché doive être absolu et exclusif, c’est-à-dire composé des trois éléments juri diques : le pouvoir de s’en servir, d’en recueillir les produits et d’en disposer définitivement. — D’autre part, la première propriété de tout individu est celle de son nom et surtout de son corps, et la personne qui s’est fait photographier, même à titre gratuit, ne doit pas être considérée comme ayant fait abandon de ce droit sacré. On peut néanmoins faire coïncider ces deux principes : le phototype négatif constitue la propriété matérielle du professionnel, comme une planche d’impression, celle de l’imprimeur; — mais cette propriété n’influe en rien sur la propriété immatérielle du cliché, qui touche à la morale plutôt qu’au droit. Cette théorie s’appliquerait aussi bien au photographe amateur. La thèse soutenue par M. le substitut Drouard, qui distingue le cas où le modèle a payé ses photographies de celui où il les à reçues à titre gracieux, méconnaît juridiquement le contrat innomé intervenu entre le photographe et le photographié. En réalité, il n’y a jamais de portrait gratuit, le contrat, né des relations du photographe et de son