Volltext Seite (XML)
— 254 — des résultats déplorables. On voit des gens animés d’une indignation vertueuse à l’idée qu’une aquarelle a pu être gouachée ; cependant l’emploi de la gouache n’est pas immoral en soi ; mais il peut être mauvais souvent comme portant atteinte aux qualités de transparence de l’aquarelle. L’on peut voir aussi, dans le même ordre d’idées, des photographes qui s’enorgueillissent d’une épreuve sans retouche. Sans retouche ! monsieur. On croit entendre parler la pure Théodore : Oui, j’ai su conserver, d’une main résolue, Au cliché sans macule une épreuve impoilue. Et de tels scrupules sont, certes, les plus respectables du monde. Si, abandonnant le principe que j’ai dit, vous vous risquez à appré cier, à doser, suivant votre sentiment propre, la légitimité de tel ou tel moyen, de tel ou tel mode d’intervention personnelle, vous pataugez immédiatement dans la casuistique, car le laid et le beau, le mal et le bien se muent l’un dans l’autre par des nuances aussi indiscernables que celles du cou de la colombe ; et par suite, vous voilà engagés dans un de ces régimes instables où les coups d’Etat succèdent aux capitulations. Si vous regardez avec complaisance mon pouce rougi de carmin quand il se promène au dos d’un cliché, pourquoi froncer le sourcil lorsque ce même pouce écrase le pigment gommeux d’une épreuve? Pourquoi le crayon discret qui efface sur la gélatine les rides de nos contemporaines échappe-t-il à vos foudres, cependant que vous les réservez au burin qui égratigne la même gélatine? Si vous tonnez alors, n’est-ce point à la manière de Jupiter, — lorsqu’il avait tort, et à défaut d’autre argument meilleur? Mais laissons là ce sujet ; aussi bien est-il depuis longtemps épuisé et les positions sont prises. Mieux vaut, à l’occasion des essais de M. Mahéo, envisager une autre question, intéressante puisqu’elle se rapporte à l’esthétique de la photographie, et que cette esthétique-là est encore en voie de formation. Une esthétique, en effet, ne s’établit pas de toute pièce et a priori, puisqu’elle est, par essence, une coor dination d’idées et que les idées sortent des faits. Or voici un fait que tout le monde a pu constater. Un instinct, conscient ou non, pousse nombre de gens à modifier, à adultérer, par certaines pratiques, la pureté du rendu photographique. M. Mahéo zèbre son épreuve de coups de plume, M. Franck Eugène raye à coups de burin la gélatine de son cliché, M. X. interpose une toile entre le cliché et l’épreuve, M. Y. place pendant le tirage au dos de son négatif le cliché d’une trame, M. Z. transfère son épreuve au charbon sur du papier vergé. Quel but poursuivent-ils ? quelle idée les guide ?