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Toute forme d’art est synthèse ; la photographie est par essence un instrument d’analyse. Triompher de cette antinomie, voilà le problème capital, essentiel, vital qui se pose. Il faut qu’il soit résolu pour que l’instrument photographique devienne procédé d’expression, — c’est ce que nos critiques semblent ou veulent ignorer. Comment triompher de cette antinomie ? par le moyen d’un com promis, et ce moyen est le seul. Du reste, que ce mot de compromis ne nous effraye pas, car tout tableau, tout dessin n’est pas autre chose. Prenons le dessinateur armé d’un crayon et assis en face d’un pay sage ; il commence par tracer les trois ou quatre lignes qui donnent l’ossature du motif. Donc, à l’origine, synthèse absolue. Puis le crayon travaille, les détails naissent ; l’artiste, parti de la synthèse, marche vers l’analyse; s’il ne néglige aucun détail et s’obstine à re produire tout ce qu’il voit, il arrivera à quoi ? au rendu photogra phique, Mais l’artiste n’opérera pas ainsi, il s’arrêtera dans cette marche vers l’analyse, négligera certains détails, en simplifiera d’autres. Qui le guidera? son goût. Voilà un compromis; heureux si l’artiste est habile, malheureux dans le cas contraire. La marche à suivre par le photographe artiste doit être la même, mais en sens inverse. Partant de l’analyse absolue que son instrument lui donne tout d’abord, il doit progresser vers la synthèse. Où s’arrê- tera-t-il ? Mais dans la même zone, je ne dis pas au même point, que le dessinateur; zone assez large du reste, car il est évident que le problème ici posé ne comporte pas de solution précise. Et pourquoi cette marche concentrique du dessinateur et du photo graphe, allant des deux pôles de l’absolu vers la région du relatif? Tout simplement parce que le but de l’art est de décrire non pour le plaisir de décrire, mais pour suggérer, et que la suggestion ne peut naître s’il y a excès d’analyse ou excès de synthèse. Détails exagérés, valeurs faussées, pigments pauvres, voilà, en ré sumé, les grands défauts de l’instrument photographique envisagé comme moyen d’expression esthétique. C’est donc à triompher de ces défauts que doit s’employer l’action personnelle du photographe ; et la voie à suivre est celle-là même qui mène à la liberté d’interpré tation, à l’originalité de la facture, but suprême des modernes efforts. Et le sujet n’a rien à faire là-dedans. A ce que je viens d’exposer, des objections sont faites, toujours les mêmes : « Alors, vous ne faites plus de photographie. — Appelez cela comme vous voudrez, le nom m’indiffère. — Dans votre marche vers la synthèse, vous piétinez sur tous les principes. — Lesquels ?