270 VOYAGE AUX SOURCES diens, c’est la force substituée au droit; c’est ce que nous offre partout et dans tous les temps l’histoire de notre es pèce; on profite de la faiblesse de l’infirme et du vieillard, et, si la loi n’avait entouré de protection la fortune de l’or phelin, il ne tarderait pas à être dépouillé. Ces réflexions, au reste, ne sont point applicables aux Indiens des trois aidées du Rio das Velhas (1819). Il est à regretter sans doute que, sous le rapport religieux et mo ral, ils fussent, pour ainsi dire, abandonnés à eux-mêmes, comme le sont plus ou moins tous les indigènes du Brésil ; mais, d’ailleurs, je n’ai point vu d’hommes de cette race qui fussent plus heureux qu’ils ne l’étaient alors. C’était à peine si quelques'Portugais étaient venus s’établir parmi eux ; personne ne les vexait, personne ne troublait leur re pos; ils ne payaient pas même la dîme. Ils avaient peu de besoins, point de tentations. Leurs terres étaient excel lentes, et un léger travail suffisait pour assurer leur sub sistance; avec le coton qu’ils avaient recueilli, ils fabri quaient dans leurs maisons la toile dont ils se couvraient; eux-mêmes faisaient aussi leur poterie; le sel et le fer étaient les seuls objets qu’ils étaient forcés d’acheter, et, pour se les procurer, ils retiraient de la vente de leurs den rées plus d’argent qu’il ne leur était nécessaire d’en pos séder. Ils vivaient dans une paix profonde et étaient unis entre eux, comme le sont généralement les Indiens; con naissant les avantages les plus réels de la civilisation, ils en ignoraient les maux; ils étaient étrangers au luxe, à la cupidité, à l’ambition, et à cette prévoyance qui poursuit les hommes de notre race et empoisonne le présent pour un avenir incertain. Hélas ! tant de bonheur, comme on le verra, devait probablement avoir bientôt un terme.