Boa Vista n’avait pas l’avantage d’être dirigé par un homme de beaucoup de sens, comme chacun des deux autres vil lages. Les Indiens de Boa Vista m’offrirent toutes les denrées du pays, ce qui prouve qu’ils ne négligent point la culture de leurs terres. Ils doivent trouver assez facilement le débit de leurs récoltes, car, chez eux, comme à Estiva et au Rio das Pedras, il existe un rancho pour les voyageurs, et la route traverse également leur village. J’étais arrivé à Boa Vista un jour de fête. Un des habi tants venait d’achever de couper les bois qui, après avoir été brûlés, devaient faire place à ses plantations. Chaque cultivateur, à son tour, invite scs voisins à l’aider dans ce genre de travail, et ensuite il les convie à un repas dans lequel on boit beaucoup de tafia et qui se termine par des batuques. Les Indiens de Boa Vista dansèrent toute la nuit, en s’accompagnant de battements de mains et de chants qui les réjouissaient sans doute, mais qui pouvaient paraître à des oreilles européennes plutôt dignes d’un en terrement que d’une réjouissance. « Les habitants primi tifs de l’Amérique, dit Eschwege (1), en parlant des In diens d’Estiva, saisissent toutes les occasions de se divertir, tandis que les nouveaux venus, Européens, s’abandonnent à la tristesse, oppriment ces pauvres gens de toutes les ma nières et leur envient le peu de joie qu’il leur est permis de goûter. » Amollis, énervés par la chaleur des contrées tro picales , les hommes de race caucasique tombent dans la nonchalance et perdent leur gaîté. Quant à l’oppression dont ils se rendent trop souvent coupables envers les In- (1) Bras., I, 86.