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ARCHITECTURE CIVILE ET DOMESTIQUE. 3V qui l’environne, comme l’abbatiale d’une riche abbaye s’élève au milieu d’un hameau qu’elle protège et nourrit. Et puis, par sa destination, n’est-il pas le réceptacle, le temple, pour ainsi dire, de la moisson matérielle, comme l’Église est la réserve commune de la moisson spirituelle des âmes. N’attire-t-il pas en effet de suite tous les regards par sa grandeur, comme le sanctuaire plus élevé des édi fices religieux de nos campagnes appelle vers lui la pensée de celui qui passe. Quel plus noble aspect donc que celui de la première façade de cette grange, et quel assemblage de mâles beautés à son frontispice ! C’est une porte à plein cintre, dont les vigoureux profils et l’archivolte à têtes grimaçantes semblent annoncer comme un arc de triomphe; c’est cet avant-corps en pyramide qui touche presque le faîte, et sert de contre-fort puissant à cette partie de l’édilice. Ce sont ses cinq baies, toutes si pures et si variées de forme, ouvertes pour éclairer et aérer l’intérieur. Ce sont encore les rampants fortement accentués du pignon, qui gagnent, après avoir fait en quelque sorte le cadre sans base d’un noble fronton, des parties droites singulièrement propres à ajouter de part et d’autre à ce superbe développement. Trois fleurons d’un excellent caractère complètent cette simple et charmante ornementation. Si maintenant nous pénétrons au dedans, rien n’est plus imposant et plus ample à la fois que cet immense toit en ardoises étendant ses versants comme des ailes sur les cinq nefs destinées à couvrir cette aire magnifique : car c’est bien quatre bas-côtés qui régnent deux à deux à droite et à gauche, et appuient le vaisseau longitudinal où les chars tout attelés peuvent apporter à leur aise leurs charges de gerbes. Cette spacieuse voie du milieu n’est pas moins appro priée à recevoir ces cercles sans nombre de batteurs qui arrachent le grain des épis aux coups cadencés de leurs fléaux. Comme ces hommes simples, s’ils avaient conservé les vieilles et naïves mœurs, pourraient être fiers de voir leurs travaux abrités par cette toiture à laquelle rien ne manque pour l’étendue et la solidité! Après un incendie allumé par les mains de l’ennemi, alors victorieux sur ce coin de notre territoire, toute la charpente fut renouvelée au xv e siècle. Elle est sou tenue par quarante-quatre poteaux de bois reposant sur des dés de pierre; ces solides et gigantesques pieux ont été choisis parmi les plus beaux arbres de nos forêts; ils semblent être posés là pour protester, par leur inaltérabilité, contre la tentative faite de nos jours pour les remplacer par les colonnettes en fer de nos modernes constructeurs. Treize contre-forts étayent, de chaque côté, un mur peu élevé qui circonscrit celte enceinte; ils indiquent les douze travées qui la divisent en compartiments où sont rangées dans un ordre régulier les différentes céréales. Enfin, la face postérieure est elle-même consolidée par un massif qua- drangulaire se bifurquant à angle droit en deux piliers butants, entre lesquels est une fenêtre, long parallélogramme, à bords taillés en biseau. Deux autres ouvertures moins hautes sont pratiquées latéralement. Tels sont, avec trois