Volltext Seite (XML)
23 MAISON DES MUSICIENS A REIMS. Musiciens pouvait donc être, à Reims, un de ces centres de distractions utiles dont les « loggia » italiennes, les « casino » de la Toscane, nous olTrent de si beaux modèles. Nous ferons connaître quelques-uns de ces admirables types en leur temps; et l’on comprendra que nos rapprochements sont fondés sur des analogies suffisantes pour établir et confirmer notre opinion. Les larges arcades ouvertes sur la rue, le double portail conduisant aux cours et aux jardins, un puits creusé sous un grand arc, non loin de la principale entrée de gauche, sa margelle laissant un libre passage entre les pièces basses, l’immensité des salles supérieures qui se réduisaient peut-être à deux seulement, toutes ces conditions prouvent que cette construction importante n’était ni la demeure d’une famille, ni une propriété particulière. Ce que nous venons de dire se trouve encore confirmé par l’ornementation, si largement entendue, de la grande façade. Cinq niches ovigales, séparées par quatre croisées à meneaux encore intacts, abritent autant de statues assises, dont toute- la partie postérieure se perd dans un renfoncement du mur en faisant corps avec lui. Les pieds de ces statues reposent sur des consoles très-saillantes, que supportent des personnages à mi-corps, d’un faire plein de caractère. Sans doute on ne s’éloignerait point de la vérité, en disant que l’antiquité n’a rien produit de plus beau, de plus noble, de plus simple et de plus harmonique que cette œuvre d’ensemble. Les draperies sont d’une touche et d’un eiret admi rables : l’ampleur et la souplesse des plis ne peuvent être que d’une main habile et exercée. La grâce du vêtement traduit avec un naturel parfait les plus gra cieuses attitudes. Ce ne sont plus ces frisures minces et multipliées que les anciens excellaient à faire ondoyer à l’air et à rendre transparentes. C’est au contraire une belle et riche étoile, qui prend toutes les formes les plus déliées du corps, et tombe en amples replis, du haut de la poitrine jusqu’aux pieds. Une molle courroie serre doucement la ceinture de chacune; ou bien encore la tunique flotte librement, comme pour ne gêner aucun des mouvements du corps et des membres. Les têtes sont d’une exquise finesse et de l’expression la plus variée. L’artiste a su donner à toutes ses statues des poses d’un grand et large style ; car toutes expriment merveilleusement l’action qu’elles ont à remplir dans ce concert si bien ordonné. Il est impossible de comprendre comment tant de beauté, de charme réel, de mouvement et de calme réunis ont pu être mécon nus dans ces derniers temps. Nos devanciers immédiats auraient bien dû recon naître, dans leur stérilité pour les beaux arts, la peine méritée de leur aveu glement. La première statue qui se présente, de gauche à droite, est celle qui tient un tambour, ou plutôt un tambourin à cause du peu de volume de cet instru ment. Elle le tient attaché à son bras par une courroie, et l’appuie doucement contre sa tête. Ce musicien souffle encore dans un tuyau, sorte de fifre percé