MAISON DES MUSICIENS A REIMS TREIZIÈME SIÈCLE Au milieu de la province de France qui a eu la gloire d’élever, suivant l’heu reuse expression d’un savant écrivain, le Parthénon chrétien 1 ; dans la vieille cité que les révolutions ont déshéritée de ses anciens honneurs, en la dépouillant de la splendeur du sacre de nos rois, il existe encore aujourd’hui une habitation particulière, à qui une haute valeur artistique donne de prime-abord droit d’asile dans notre recueil. Située dans une rue tortueuse, dédaignée, désertée par la fortune, par ses loisirs et ses joies, cette demeure a pour nous un prix que relève davantage l’abandon où elle est tombée; disons plus, menacée de jour en jour dans les restes de son existence, elle nous a paru, par son importance et le mérite de ses sculptures, devoir fixer un de nos premiers choix. Sauver des débris précieux au profit de l’art dans son application pour l’avenir, c’est l’un des principaux buts que nous nous proposons d’atteindre par notre publication. L’édifice, connu à Reims sous le nom de Maison des Musiciens, n’a pas eu à souffrir seulement de l’action destructive du temps. L’ignorance, la prévention, le zèle mal inspiré des administrations ont certes plus avancé sa ruine que les cinq siècles qui nous l’ont légué. Cependant, malgré ses mutilations successives, malgré les altérations et les changements qu’il a subis à diverses époques, il nous reste encore assez de vestiges de son état primitif pour reconstruire, avec quelque certitude, au moins l’étage inférieur qui a le plus souffert, et pour décrire aussi la disposition générale de son plan. Mais tel il est aujourd’hui, tel nous essaierons de le faire connaître, en suppléant par des conjectures fondées à ce que tant de causes de destruction lui ont enlevé. Cette antiquité nationale est loin d’être la moindre des richesses archéologi ques que renferme la ville de Reims. Devenue la propriété de simples marchands, cette précaire condition ne peut fixer sa destinée depuis si longtemps incertaine. 1. C’est ainsi que M. Didron, dans un de ses plus beaux travaux des « Annales Archéologiques », a caractérisé le chef-d’œuvre du siècle de saint Louis. 3