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lii ARCHITECTURE CIVILE ET DOMESTIQUE. les conditions de son existence à l’aide desquelles on a voulu, dans ces derniers temps, rétablir sa dénomination et son usage ; car il avait perdu l’un et l’autre au milieu de l’indifférence générale qui avait gagné les pouvoirs locaux comme les habitants pour tout ce qui venait d’un passé haï ou dédaigné. Jugez donc combien les conflits de culte, les dissensions de tous genres, avaient causé d’anéantissement de tous les souvenirs publics de la commune, en voyant l’abandon où était tombé un bâtiment d’une si frappante originalité. Là, dans une population toujours assez soutenue et s’élevant à plusieurs mil liers d’âmes, il n’est pas une famille qui ait conservé l’héréditaire transmis sion des récits du foyer domestique, si propres à rattacher la mémoire des générations aux murs de ce bâtiment témoin permanent, depuis plus de six siècles, des grands actes de la cité. Là, l’effacement de l’orgueil de clocher, mobile si légitime en un certain sens, a été plus complet encore que partout ailleurs. A ce moment, dans Saint-Antonin, il ne se trouve pas à consulter, relativement à notre sujet, un seul de ces vieillards, chroniques vivantes des lieux qui les ont vus naître: nul, à quelque rang de la société que vous vous adressiez, ne peut vous rien apprendre de cette œuvre d’architecture, échappée comme par miracle aux funestes suites de l’ignorance, aux malheureux effets de l’indifférence et du mépris. C’est à ce point que sa dénomination primitive, retrouvée aujourd’hui par une assez sûre indication, grâce aux soins de l’art le plus éclairé uni à la plus saine archéologie, n’a pu jusqu’ici être adoptée par les habitants, tant a été profond l’oubli où ils l’avaient laissée. Et savez-vous com ment ils entendent réparer présentement leur coupable dédain? Même après la résurrection de ce corps tout mutilé par leurs mains, ils persistent à lui refuser son nom propre, celui qu’il reçut sans aucun doute de leurs ancêtres à sa pre mière naissance. Non, ce n’est point l’hôtel de ville qu’ils le veulent appeler : une autre désignation plus générale a été préférée par eux pour rendre témoignage du prix qu’il a retrouvé à leurs yeux : depuis les pères jusqu’aux enfants, tous à l’envi le nomment entre eux le Monument. Ce fut ainsi que nous fut indiquée à nous-mêmes cette remarquable construc tion. A son aspect, il nous fut impossible de ne pas reconnaître son vrai carac tère. Une grande loge inférieure, à trois baies ogivales, accrue d’une quatrième travée à jour sur toutes ses faces et servant de base à la tour du beffroi, comprend l’espace entier du rez-de-chaussée. Presque toutes ces ouvertures étaient autant de passages libres pour aller de la place publique à une halle postérieurement éta blie. A ce niveau, toute la surface est parfaitement unie, si ce n’est qu’on voit une sorte de piédestal à large dé recevant le mince trumeau du milieu. La tablette saillante de ce socle était peut-être destinée au crieur public, qui pouvait de là se faire entendre de l’assemblée des promeneurs et des marchands. Il n’est guère possible d’expliquer autrement cette différence si marquée entre ce point