DE LA SUISSE. 229 qui y régné, fatisfait l’efprit & le cœur. Il n’en eft que plus dangereux pour les jeunes gens ; le vice y reçoit une abfolution trop honorable. F'oltaire, dans un moment d’humeur contre Jean-Jacques Roujfeau , difoit en plai- fantant : Je voudrois arracher les bonnes pages du Roman de Julie. Ces Ouvrages avoient acquis à Roujfeau une grande célébrité ; il ne lui reftoit plus pour l’augmenter que d’éten dre les principes de Religion qu’il avoir jettes dans fon Difcours fur l’inégalité, & qu’il avoit mis en aélion dans la Nouvelle Réloïjè. Le filence qu’on avoit gardé lors de la publication de ces Ouvrages , l’enhardit à donner clai rement ôc diftinébement Ton fyftême de religion naturelle dans fon Emile, où, parmi plufieurs préceptes d’éduca- tion bons ou mauvais, il fait faire à un Vicaire Savoyard une confelfxon de foi, qui donne tout aux œuvres & rien à la Foi. Cette témérité fut réprimée par les Minières de la Religion dans leurs Mandemens, & par les Minières de la Juftice dans leurs Arrêts. Le Parlement de Paris, par fon Arrêt du p Juin 17 <51 , condamna Y Emile à être brûlée, & décréta l’Auteur. Roujfeau fut obligé de quit ter fon féjour de Montmorency , où il avoit paffé plufieurs années à compofer fon Héloïje & fon Emile ÿ il avoit choifi pour retraite la ville de Genève, dont il s’étoit fait hon neur & qu’il hcnoroit, lorfqu’il apprit que fon Emile y avoit été traitée le 19 Juin comme à Paris. Forcé de renoncer à cette retraite & à celle qu’il vou loir prendre dans Je Canton de Berne, il obtint du Roi de Prujfe la permllfion defe retirer dans le Comté de Neu~ châtel. Il choifit Moutier-Travers, où il étoit établi le 2 *