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4 o LE MUSEUM que ce Roi tyran fit aux Mufes en détruifant les lieux d études où la jeunefie alloit s’inftruire, & les lycées où les Sçavans fe rafièmbloient. La fuite des Mufes ne pourroit-elle pas indiquer encore cette vérité, qu’elles ne fçauroient habiter où les Souverains les dédaignent & les méprifent, & où règne la tyrannie ? Quant au défi fait par les Piérides aux Mufes, de mieux chanter qu’elles, il feroit trop long d’exprimer d’après le même Ovide & l’arrogance de ces neuf filles de Piérus & d’Évippe, & leur orgueil à chanter les premières fans prendre les loix du fort ; de rapporter les airs fublimes que met le Poète dans la bouche de Cailiope, qui chante au nom de fe fceurs & qui raconte toute l’hif- toire de Cérès ; enfin , fi toutesfois on peut imiter les nuances des couleurs qu’il emploie, de peindre d'après lui le rire amer des Emaihld.es (i) , leur infui- tant mépris des menaces faites par les Mufes, leur étonnement en voyant leurs corps fe couvrir de plumes, leurs mains fe terminer en ailes, leurs bouches fe convertir en becs : les fenfations qu elles éprouvent, lorfque voulant enfin expri mer leur douleur en frappant leur poitrine, l’agitation de leurs bras les enlève de terre & les porte fur les arbres des forêts, d’où leur rauque caquet fe fait entendre, annonce encore leur intarifiable goût pour un babil importun, & reproduit leurs fottes infultes contre leurs viftorieufes rivales. Ç’çft ainfi que l’ingénieux Ovide a rendu piquante par les grâces de fa Poéfie, & fon génie fertile, une biftoire bien naturelle & bien fimple. Piérus, mauvais Poète, remplit fes ouvrages de traits peu dignes des Dieux: il en fit un , nous dit Plutarque , dans fon Commentaire fur la Mufique, où il atta- quoit les Mufes, & dès-lors fes enfans furent cenfés avoir livré combat aux filles de Mémoire, & , comme fes Vers ne contenoient qu’un ennuyeux & dégoû tant verbiage , on fuppofa facilement que ces mêmes enfans, défignés par le nom de filles à caufe de leur foiblefiè, furent changés en pies importunes & babillardes. Après nous être occupé des Mufes en général, revenons maintenant à celle que nos deux Statues repréfentent. C’eft Uranie, dont le nom annonce la con- noifiance du Ciel. Les Anciens regardoient cette Mufe comme l’inventrice de l’Altronomie, & célébraient beaucoup la Science qu’elle avoit des Aftres. Dans la Statue de la Planche XIV on ne peut la méconnoître. Son diadème femé (i) Les filles de Piérus furent furnommées Émathides, du nom de l'Émathie, qui fut Refais la Macédoine. , . d étoiles,