— 244 — Très jeune encore, M. Charles Champigueulle a été initié à l'art ancien par la restauration des précieuses et inimitables verrières des cathédrales de Chartres et du Mans. Artiste dont les œuvres sont à tous le Salons, statuaire distingué (un bas-relief signé de lui, Y Alsace- Lorraine, figure cette année au salon), il ne s’est point laissé aller à la routine des faciles et fructueuses productions commerciales. M. Charles Champigneulle a compris que si le vitrail à teintes plates dont chaque contour est indiqué par les plombs retenant les morceaux de cette transparente mosaïque, à bien sa place dans les cathé drales gothiques ou dans certains palais, il n’était point de mise dans les appartements modernes ; il a voulu dé montrer que l’on peut et que l’on doit peindre sur verre comme l’on peint sur toile, et il y a réussi. Entre autres œuvres, M. Charles Champigneulle a envoyé à l’exposition d’Amsterdam un tableau dont l’effet sera considérable. Tableau est bien le titre qu’il faut donner à une telle œuvre, mais tableau peint sur verre. Debout, au milieu d’un salon, une jeune femme en costume renaissance joue de la mandoline. Ce portrait en pied est de grandeur naturelle; il est difficile d’imagi.ier rien de plus éclatant à la fois et de plus harmonieux. Carolus Duran ne renierait certainement point la facture de la robe de soie bleue si chatoyante, ni de la tunique de velours marron. Que ce maître du portrait s’essaye à peindre sur verre, quelle merveille ne nous donnera-t-il pas ? Nous connaissons aussi de M. Champigneulle certains vitraux inspirés des Japonais qui ne sont pas déplacés à côté des œuvres de ces maîtres décorateurs. Disons en terminant que les efforts du jeune peintre verrier pour renouveler son art et le sortir des banales ornières sont couronnés de succès. Endécorant les vastes baies de l’Eden- Théâtre de verrières du style persan le plus pur, il a victo rieusement établi qu’à la condition d’être traité par un véritable artiste, le vitrail peut pénétrer en des milieux dont sa réputation de sévérité lui auraient autrefois fermé l’accès.