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nombreuses, divergentes ; tantôt les différences proviennent de l’obstination de vaincus, conservant imperturba blement certains de leurs usages originels devant leurs vainqueurs; tantôt c’est la survivance, sous le drapeau de l’Islam, de quelques débris des cultes anciens passés à l’état de fétichisme. Les exemples que la photographie nous transmet, sauf les courtisanes, ballerines, chanteuses et autres, maures, juives, espagnoles, qui se trouvent là, comme sur tout le littoral levantin, et s’affublent selon un caprice où l’étranger a une part plus ou moins large, ces exemples ont le caractère de types, et servent, en montrant leur diversité, à faire connaître l’aspect réel de populations où, comme le dit M. Carette (1), « toutes les classes observent, dans la forme et la couleur de leurs vêtements, certains usages particuliers. » Beaucoup des nuances différentes échappent à l’œil des étran gers, non à celui des indigènes; pour lui, elles sont aussi sensibles que l’est pour nous le ravalement du Juif, auquel le turban fut interdit : le Juif devant lequel une Mauresque dédaigne de se voiler, « un Juif n’étant pas un homme. » De ces complications, il résulte de grandes difficultés pour se reconnaître. A l’heure qu’il est, par une anomalie étrange, malgré cinquante ans d’occupation, l’Algérie semble, sous certains rapports, moins connue que ne le fut de Pline, de Solin, d’Isidore de Séville VAfrica propria des Romains. On peut d’ailleurs entrevoir la complication d’un problème à peu près inextricable lorsqu’il s’agit, comme ici, de peuplades accu mulées sous un même drapeau religieux, dont le Dieu a quatre-vingt-dix-neuf noms, ayant chacun sa vertu particulière et, peut-être, chacun ses dévots, sans compter les grands schismes (2). Nos n 08 1 et 7 représentent des Mauresques; la première, de Tunisie, l’autre, d’Algérie. Leurs costumes peuvent se passer de description. Toutes deux sont en tenue d’intérieur. Au dehors, ces femmes sont tellement couvertes et voilées qu’on ne peut guère distinguer que leur embonpoint, d’ailleurs fréquent, et dont elles tirent vanité. Ce charme est si estimé parmi les Maures, qu’il l’emporte même à leurs yeux sur les agréments de la figure et la régularité des traits; aussi les femmes se le procurent-elles par tous les moyens possibles; quand la vie du harem, oisive, sédentaire, ne suffit pas, on mange force farineux et, dit-on, toutes sortes de choses étranges comme les scarabées, dont usent les Egyptiennes qui sont dans le même cas. En général, ces Mauresques du far-niente engraissent jusqu’à acquérir des formes assez exubérantes pour être gênées dans leur marche ; cela prête à leur allure habituelle une physionomie particulière, celle des canes de basse-cour. Par une affectation de ton, les femmes qui n’ont pu parvenir à se procurer les inconvénients physiques qui occasionnent cette dé marche, ne manquent pas de prendre la tournure forcée des autres; cela leur sert à se distinguer des femmes des basses classes dont la marche est aisée et agile. N° 2. — Chef arabe. Variante du costume décrit. » N 08 .3 et 4. — Enfants mendiants. (1) VAlgérie {Universpittoresque). (2) Les mystiques musulmans portent, en l’honneur de ces quatre-vingt-dix-neuf noms, des chapelets ayant un nombre pareil de grains, sur chacun desquels ils récitent un des noms divins. Ils disent que le centième nom est resté caché aux hommes, et que celui qui parviendrait à le connaître en recevrait la puissante universelle, le don des miracles ; qu’il deviendrait le maître de l’univers, commandant aux génies, aux anges ; enfin, que ce nom n’a été révélé qu’à Adam, a Salomon et à Mahomet. (J. Marcel, dans Y Univers pittoresque.)