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« berbère qui formaient le fond de la population autochtone. » (G. Maspero, Histoire ancienne des peuples de l'Orient.) On connaît un fait plus récent, d’une certitude absolue, qui, en expliquant la transformation de l’existence d’une partie de la population nomade, pour qui la tente devint le gourbi, ouvre une voie nouvelle à la conjecture des contacts phéniciens. C’est grâce à ces contacts que les Numides errants, dès lors fixés, auraient pu recevoir des connaissances qui devaient leur manquer, et contracter l’habitude du travail indispensable pour faire réussir une entreprise désespérée, qui dure encore. Ce fait certain est celui rapporté par les historiens latins, que ceux des vaincus du littoral africain qui ne voulurent pas se soumettre aux Romains leur abandonnèrent la plaine, les bois et les ravins leur offrant un abri inaccessible aux centurions, et leur permettant de se soustraire aux exigences du fisc. Nous avons dit que c’était là une entreprise désespérée, ne semblant pas avoir de chances de durée, et voici pourquoi : le Kabyle d’aujourd’hui, comme le Numide d’alors, des chaînes de l’Atlas, du pays d’Alger et de Tunis, a besoin d’une industrie active, produisant des objets de commerce, d’échange, pour vivre en conservant l’indé pendance ; ses armes seules auraient été impuissantes pour résoudre ce double problème, le sol de plaine, propre aux céréales, [qu’il exploite, étant trop restreint pour satisfaire à sa nourriture. Le travail allié à la bravoure est donc devenu la loi suprême; et aujourd’hui on voit le Kabyle réunir, chose rare, l’amour de l’indépendance, habituel aux montagnards, à celui du labeur, plus fréquent chez l’homme de la plaine. Mais comment ces demi-sauvages qui ne pouvaient avoir, en se réfugiant dans leurs aires, que des connaissances de pasteurs errants, purent-ils acquérir l’expérience nécessaire au travail fructueux dont ils avaient un besoin immédiat? Par qui leur furent ré vélés les secrets et les avantages de leurs fabrications comme de leurs cultures? N’est-il pas vraisemblable que, par suite des rapports qu’ils avaient eus avec Carthage détruite, à laquelle ils avaient fourni des troupes mercenai res, un certain nombre de Pœni, comme les écrivains latins appellent les Carthaginois à cause de leur origine phé nicienne, qui devaient être ardents entre tous à se soustraire à la domination romaine, s’étaient réfugiés parmi les Numides ; et n’est-il pas à croire que c’est surtout par ces Pœni qu’ils furent initiés aux pratiques d’une agricul ture perfectionnée, dont les Carthaginois avaient la réputation ; que c’est par eux que leur sont venus les formu les traditionnelles de leurs arts populaires, leur permettant de fabriquer des objets de commerce et d’échange dont les Phéniciens connaissaient de longue date toutes les ressources? Si l’on admet une origine si fortement indiquée, il semble que cette probabilité doive être d’un certain intérêt; car on pourrait considérer dans les bijoux d’antique formule de la Kabylie, malgré le contact arabe, un reflet vi vant, bien rudimentaire, mais enfin un reflet direct des arts si peu connus de la phénicienne Carthage, de l’in dustrie de ceux qu’Hiram, roi de Tyr, prêtait à Salomon pour la construction et l’ornement du temple de Jérusalem de ces artisans de Sidon dont il est parlé en tant de passages d’Homère. Le Kabyle est généralement agriculteur; arboriculteur; son industrie varie néanmoins selon la situation de sa tribu. Vers les sommets des montagnes, où régnent d’immenses espaces couverts de forêts vierges, il est bûche ron et tourneur ; ce sont les Beni-Aïssi qui font toute la vaisselle indigène, et particulièrement les grands plats