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(les coquilles marines, parfois fossiles et empruntées aux couches tertiaires, composaient ces ornements. On y joignait des dents de grands carnassiers. On taillait aussi dans le même but des plaques d’ivoire, certaines pierres tendres ou dures ; on façonnait en argile des grains qu’il suffisait de laisser durcir au soleil. Enfin, on se tatouait, ou tout au moins on se peignait avec les oxydes de fer ou de manganèse, dont on a souvent rencontré de petites provisions, et dont on a reconnu l’action sur les os de quelques squelettes. Enfin, il y eut un art magdalénéen. L’adoucissement relatif des conditions climatériques, la diminution des grands animaux féroces amenant la multiplication des espèces utiles et surtout celle du renne, placèrent à cette époque l’homme de Cro-Magnon dans des conditions de bien-être inconnues â ses prédécesseurs. Il eut quelques loisirs, et en profita pour développer ses aptitudes les plus élevées. Les instincts artistiques manifestés par la gravure et la sculpture des hommes de l’âge de la Madeleine, leur font une place tout exceptionnelle parmi les populations dont l’évolution s’est arrêtée au degré le plus inférieur de l’état social. Certes, leurs productions sont inégales, mais il est tels manches de poignard, représentant le renne accroupi, les jambes repliées, la tête allongée et les bois couchés le long du corps de manière à ne pas gêner la main qui tient cette poignée, où, par le naturel des attitudes, et l’exactitude des proportions, on sent se révéler les plus heureuses facultés. On sculptait le bois du renne, et, armé de la pointe à silex, on burinait surtout ce bois, et tour a tour l’os, l’ivoire du mammouth, les pierres de diverses natures. Le dessin représen tatif consistait à tracer les traits du bœuf, de l’aurochs, du cheval, du renne, de l’élan, du cerf, du bouquetin ; de cétacés, de certains poissons, etc. Parfois c’était l’ours des cavernes, trouvé sur un schiste, ou encore le mammouth, donnant une idée fort exacte de ce géant de l’ancien monde, depuis si longtemps disparu, mais ayant laissé son portrait dans une caverne du Périgord. Lorsque ce n’étaient point les animaux que la pointe gravait, c’étaient les plantes, le monde végétal, et lorsque ce n’étaient ni les uns ni les autres des objets qui frappaient le regard, c’étaient des caprices d’imagination, des dessins d’ornementation, dans lesquels se rencon trent, dit-on, presque tous les motifs réinventés tant de siècles après. L’image de l’homme ne figure que très rarement parmi ces dessins ou ces sculptures. Elle est inférieure, sans vérité sincère ; on suppose que la cause de cette abstention a dû. tenir à quelque idée superstitieuse, analogue à la crainte que fit éprouver Catlin en terminant son premier portrait de Peau-Rouge ; une partie de la tribu le regarda comme un sorcier qui venait d’enlever à son modèle quelque chose de son individu. Quelque imparfaits que soient ces dessins, ils fournissent pourtant quelques renseignements sur le genre de vie des chasseurs. On y apprend que ces hommes poursuivaient les plus gros gibiers, nus comme sont souvent les Peaux-Rouges, les cheveux relevés en touffe sur la tête, et armés seulement de la lance ou du javelot. En voyant un homme aussi nu, étendant son bras vers une baleine, probablement échouée, qu’il a combattue et vaincue, on y apprend encore que l’homme quaternaire des montagnes en descendait parfois et allait jusqu’au bord de la mer pour y chercher sa subsistance. Les tribus de la Madeleine, de Bruniquel, devaient reconnaître des chefs. C’est sans doute pour eux que l’on sculptait les poignards en ivoire de mammouth, comme celui que porte à la ceinture notre n° 8, qui semble n’être qu’une arme de parade. Existait-il dans la tribu une véritable hiérarchie dont chaque grade était reconnaissable à certains insignes? On croit en trouver la preuve dans des pièces en bois de renne, présentant un type assez uniforme, volontairement amincies et habituellement décorées avec un soin tout particulier. Tantôt elles sont pleines, tantôt, vers l’une de leurs extrémités, elles sont percées de un à quatre trous ronds, qui parfois entament le dessin primitivement tracé. Ce ne sont pas des armes, et on les tient pour des bâtons de commandement, dans lesquels le nombre de trous indiquait le grade hiérarchique. A la figure de certaines parures de cou portées par ces gens, parures ayant tout le caractère d’amulettes, qui consistaient en une plaque percée au centre d’où partent des rayons divergents, emblème analogue répété trois fois sur un bâton de commandement, et dans lequel on voit autant d’images du soleil, on incline à croire que le soleil était adoré par ces hommes, qui auraient ainsi inventé le dieu solaire, retrouvé plus tard par les Egyptiens et les Gaulois.