— 57 — tâche, comme on l’a fait dans les tranchées de Chalouf, les plus dures de toute la ligne. Nous ferons remarquer que même le prix de 5 francs est excessif, et qu’en Europe, sur nos côtes, on exécute des dra gages et des déblais semblables à 1 fr. 50 le mètre. Mais il faut reconnaître qu’à l’isthme il a fallu lutter avec tous les obstacles de la nature et créer la vie dans les sables du désert, dépourvu de toute espèce de ressources. Nous ne voulons attaquer la loyauté de personne : les ingé nieurs-entrepreneurs ont trouvé des prix avantageux, ils en ont profité; c’était leur droit et leur métier. Ils ont déployé de l’activité et de la science, mais leur récompense a été large. M. de Lesseps, homme d’imagination vive et d’une har diesse peu commune, n’a vu que le but à atteindre ; son temps a été consacré entièrement aux complications poli tiques inhérentes à l’isthme, aux combinaisons financières, à soutenir les défaillances de Saïd-Pacha et même du conseil d’administration, à calmer ou à déjouer les ruses de l’Angle terre, à détruire les ravages faits sur les esprits européens par l’opinion du célèbre Stephenson, ingénieur anglais, dé clarant que le percement de l’isthme de Suez était une chi mère. A ce moment qu’était devenu son génie proverbial ? Aurait-il consenti, pour soutenir la politique de lord Pal- merston, à parler contre sa raison ? L’histoire appréciera. Pour dépeindre ici les difficultés qu’a rencontrées l’ardent promoteur de l’isthme, un volume ne suffirait pas. Mais nous ne pouvons nous empêcher de reconnaître qu’il n’y a pas eu derrière lui un ingénieur-directeur général assez clairvoyant et économe pour comprendre que le crédit public