LA TERRE DE SERVITUDE. 31 lutte contre le chef nègre de Kahama, dans l’Ougolo, Kisesa refusa de marcher. Beaucoup d’autres Arabes l’imitèrent, di sant que Kahama n’est qu’un petit village, et que Sayd avait assez des soldats payés par le sultan de Zanzibar pour faire sa besogne lui-même. Or Sélim, qui s’entend assez bien à gou verner des Arabes, et à maintenir la paix parmi de paisibles marchands, n’a ni la tête ni le cœur qu’il faut pour faire la guerre. Parlez-moi de Kisesa pour cela. Aussi deux ou trois semaines après le départ de Sayd, nous ne fûmes pas sur pris du tout de le voir revenir, battu à plates coutures par Kahama; Kisesa et les autres Arabes se moquèrent bien de lui. Quelque temps après, la guerre éclata avec l’Ourori ; Sayd fut requis d’appeler tous les Arabes sous les armes. II refusa, et dit que si Kisesa voulait y aller, lui, Sayd, en qualité de gou verneur de l’Ounvanyembé, donnerait à Kisesa le droit de conduire les Arabes à la guerre, et le mettrait à la tète de l’armée. Kisesa accepta tout de suite ; immédiatement les prin cipaux Arabes déclarèrent qu’ils voulaient bien aller avec lui. Au bout de quelques jours, Kisesa partit donc de l’Ounyanyembé avec mille hommes environ. Aussi Ounyanyembé ressemblait à un pays désert. Vers le vingtième jour, nous arrivâmes dans le voisinage de Kouikourou, capitale de l’Ourori. Cette nuit-là nous dormîmes tout armés; à un signal donné, nous nous mîmes tous à ramper à travers les buissons pendant près d’une heure; et à la clarté de la lune, nous aperçûmes le borna 1 du village royal. Je vous réponds que nous ne perdîmes pas notre temps à le regarder; nos cornes donnèrent le signal, et nous nous élançâmes du côté de la palissade. En un clin d’œil, les hommes de Kisesa touchaient la palissade, et entre les pieux 1. Palissade.