LA TERRE DE SERVITUDE. 243 Le lendemain matin, après quelques heures de marche, Simba s’arrêta tout à coup et s’écria :.« Un champ de blé ! » Niani et Abdallah tressaillirent comme si on eût crié à leurs oreilles : « Voici Férodia! » Les pauvres enfants voyaient par tout leur cruel persécuteur. On les rassura bien vite; ce ne pou vait être là le pays de Férodia; il était bien loin derrière eux. Peut-être même les habitants de cette contrée n’avaient-ils jamais entendu prononcer le nom de Férodia. Après avoir longé le champ de blé pendant près d’une heure, la petite troupe se trouva sur les bords d’une rivière; l’eau était brune et paraissait profonde; la rivière, qui coulait du sud au nord, pouvait avoir vingt mètres de large. Tout à coup, Niani poussa une exclamation de surprise; Kaloulou revint sur ses pas; il vit alors, au milieu des roseaux, une pirogue avec ses quatre pagaies. Que faire? traverserait-on la rivière avec cette pirogue? Motto fut d’avis qu’il ne fallait pas s’exposer à quelque fâcheuse rencontre, avant d’avoir bien reconnu le pays. Le plus sûr était de se mettre à couvert dans quelque fourré épais. Ils trouvèrent bien vite leur affaire et se glissèrent au milieu des broussailles, laissant Niani en sentinelle. Simba demanda à Kaloulou : « Quelle tribu habite ce pays? —Je crois, répondit Kaloulou, que ce sont des Oua-Liemba. Cette pirogue doit appartenir à des chasseurs, qui l’ont laissée là pendant qu’ils battent la plaine. » Motto fut d’avis qu’il fallait se cacher jusqu’à minuit, puis s’emparer de la pirogue pour descendre la rivière. Sélim et Abdallah pensèrent que ce serait faire un acte d’hostilité cpie de prendre la pirogue; mais on les réduisit au silence par des raisons auxquelles ils ne trouvèrent rien à répondre. La nuit vint enfin et Niani fut relevé de sa faction.