LA TERRE DE SERVITUDE. 235 siennes, il le regarda avec tendresse, il l’attira à lui et l’em brassa. « Ma mère elle-même te remerciera, Niani. Te souviens-tu d’elle? — Si je m’en souviens ! pourrais-je jamais vous oublier, elle ou vous? — Ne me dis plus vous, dis-moi toi; tu n’es plus mon esclave, tu es mon ami, comme Simba et Motto. — Oui; mais, maître Sélim, Simba et Motto sont grands; moi je suis petit et mauvais; quelque jour peut-être je ferai quelque chose de mal, et vous ne serez plus mon ami. — Si cela arrive jamais, je me souviendrai de la nuit où Niani a risqué sa vie pour sauver la mienne et je me dirai : Pardonne à Niani, en souvenir de ce qu’il a fait. — Et moi aussi, dit Abdallah, je serai l’ami de Niani. » Simba reprit : « Puisque Niani n’a plus ni père ni mère, le pauvre petit, moi je l’adopte pour mon enfant. Je vous prends tous à témoins. » Pendant six jours encore, ils marchèrent sans sortir de la forêt. Ils virent beaucoup de gibier, et chaque jour ils firent sécher de la viande, en vue de l’avenir. Le septième jour, Kaloulou dit : « Nous pouvons tourner à l’ouest, et marcher dans cette direction pendant trois jours ; nous inclinerons ensuite légèrement vers le nord-ouest, ou bien, selon les circonstances, nous prendrons une autre di rection pour gagner le lac Liemba. » Il fallut bientôt quitter la forêt et renoncer à l’ombre et à la fraîcheur de ses voûtes séculaires pour affronter la chaleur étouffante et les difficultés d’un fourré épineux et bas. Les plantes du genre cactus et du genre aloès envoyaient par bouffées leurs exhalaisons nauséabondes ; on marchait pas à pas parmi les plantes épineuses qui formaient un tissu serré et