LA TERRE DE SERVITUDE. 195 dans la terre. Kaloulou regarda la blessure, et en ayant me suré l’orifice, il se tourna vers Motto avec des yeux surpris. « Kaloulou, dit-il, a vu dans son village des hommes tués par les balles des guerriers de Kisesa, mais quel fusil a pu faire des trous si énormes dans la tête de cet éléphant? » Motto lui expliqua alors que Sélim avait tiré les deux coups à la fois, à petite portée, que les deux balles avaient pénétré ensemble dans la tête et n’y avaient fait qu’une seule blessure. Laissant dix hommes pour extraire les défenses, Kaloulou alla rejoindre Sélim et Simba, près de la seconde victime de Sélim ; là encore Kaloulou put constater les ravages affreux qu’avait produits la double balle dans la tête du malheureux éléphant. Kaloulou sauta au cou de Sélim ; quant aux autres chasseurs, ils l’egardaient le jeune Arabe avec une surprise mêlée d’ad miration. Le soir, toutes les défenses étaient extraites. On apporta au camp une partie de la chair des éléphants, principalement les pieds, le cœur, le foie et les côtes, que l’on mit rôtir devant des brasiers ardents. Pendant ce temps-là, on racontait autour des feux les événements de la journée, qui, à force de passer débouché en bouche, s’accrurent d’une foule de détails, dont quelques-uns devinrent légendaires, séance tenante. A minuit, tout le monde dormait. La troupe s’enfonça encore plus dans le sud, et en moins de deux semaines nos chasseurs avaient abattu plus de vingt éléphants. Surchargés d’ivoire, ils reprirent le chemin de la capitale, incapables d’en porter davantage.