188 LA TERRE DE SERVITUDE. qui entourait l’étang, les éléphants se retournèrent pour voir quels étaient les intrus assez hardis pour oser paraître devant eux. Les chasseurs, d’un commun accord, s’arrêtèrent pour observer les monstrueux animaux qu’ils avaient l’intention de tuer. Quelle vue ! Kaloulou, en l’absence du magicien, fit quelques pas en avant, comme chef de chasse : la lance levée, comme s’il allait frapper, il entonna le chant de mort de l’éléphant sur lequel il avait jeté son dévolu. L’éléphant était à peine à trente pas; derrière lui ses compagnons regardaient les chasseurs avec étonnement. Le chant de mort déclarait que c’en était fait de lui, que Kaloulou était venu des rives de la Liemba exprès pour le tuer. S’il avait à faire ses adieux aux forêts, aux prairies, aux maré cages, il avait juste le temps : Soltali avait prédit sa. mort, et Soltali ne mentait jamais. Dès qu’il eut chanté le dernier vers, Kaloulou cambra vigou reusement sa taille, leva le bras droit, et le fer aigu de la lance, après avoir brillé comme un éclair, s’enfonça dans la poitrine de l’éléphant. ■ Cet exploit fut salué par de grands cris ; dès que l’éléphant sentit la douleur, il poussa une clameur de rage, et chargea son ennemi à grandes enjambées. De toutes parts on se mit à encourager Kaloulou dans sa fuite et à lui donner des conseils. Mais on avait beau harceler l’éléphant en lui lançant des javelines, il ne se laissait pas détourner de sa poursuite : heureusement Kaloulou se sou venait des avis de Soltali, et à chaque instant il se déro hait, en faisant des crochets à angle droit; sans cela, l’élé phant l’aurait atteint et broyé en moins d’une minute, tandis qu’à chaque instant il continuait à charger dans le vide, assez