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70 VOYAGE AUX SOURCES DU NIL. sur ma gauche, et de fort près, le mugissement d’un buffle. Bien tôt, me dirigeant de ce côté, je découvre un troupeau nombreux qui paissait en toute sécurité. Avant que ces animaux ne se fussent doutés de ma présence, une des femelles avait reçu ma balle en plein corps. Je recharge immédiatement, et vise un taureau qui reste étourdi sous le coup. Voici tout le troupeau en grand émoi; mais, ne sachant d’où venait la fusillade, ces animaux vont ou viennent indécis, et je mets à profit le répit qu’ils me laissent, d’abord en achevant la femelle blessée, puis en expédiant ma quatrième balle au taureau conducteur, qui s’effarouche et prend la fuite. La troupe dont il était le chef commence à s’ébranler dans la même direction. Je m’élance sur ses traces, appelant à moi mes deux acolytes, et comme les empreintes s’accusaient nettement sur le sable hu mide, j’ai bientôt rattrapé la bande fugitive. Je tire à droite, à gauche, sans m’arrêter un instant, toutes les fois qu’à travers le taillis m’apparaît quelque croupe roussâtre. Plusieurs de mes balles portent; mais ces blessures d’arrière-train n’ont rien de mortel. L’épaisseur de la jungle s’oppose à ce que, faisant un dé tour, j’attaque l’ennemi de front. Un des buffles, cependant, à qui j’ai cassé une des jambes de derrière, se hisse péniblement sur un de ces monticules artificiels que crée le travail des fourmis blanches, et, dès que je parais, fond sur moi les cornes bassês.Un premier coup de carabine le jette par terre, un second l’a bientôt achevé; puis je retrouve la piste sanglante d’un autre blessé, presque aussi boiteux que le premier. Atteint dans le flanc pour la seconde fois, celui-ci chancelle et se dérobe à notre vue en se dissimulant au milieu d’un fourré, d’où il s’élance droit sur nous quand il nous croit tombés dans son embuscade. A peine ai-je le temps de le coucher en joue avec mon petit Lancaster. Notre dés ordre devient comique. Souliman, fidèle à ses instincts de singe, saute après une basse branche, et y reste cramponné justement au-dessus de l’animal furieux. Faraj s’est hâté de fuir, ne me laissant qu’un fusil pour me tirer d’affaire. Le bonheur veut que le coup, précipitamment léché, atteigne la bête à la naissance de l’épine dorsale. Elle tombe morte à mes pieds. Nous lui ouvrons la gorge, conformément à l’usage musulman, et croyant avoir assez à faire de retrouver le premier blessé pour l’achever à loi sir, nous revenons sur nos pas. Guidés par les tra^s sanglantes,