SIX SEMAINES CHEZ KAMRASI. 491 27 octobre.—Requête au roi d’envoyer des porteurs au Kara- goué pour y chercher les diverses marchandises que nous avons laissées derrière nous. Il me fait donner avis de préparer mes dépêches. Soixante hommes partiront demain. 28 octobre. — Mes dépêches sont prêtes, et je les envoie au palais. Mon messager y est retenu la meilleure partie du jour, et on lui fait dire ensuite de revenir demain. Comme ces mauvaises plaisanteries se sont fréquemment renouvelées,je crois à propos de donner cette fois à mes plaintes un ton plus énergique et plus vif. Je me déclare las de cette politique mensongère qui consiste à retenir les gens, sous mille vains prétextes, dans une véritable captivité. « J’ai été trompé sur la durée du voyage de Bombay; je le serais encore si j’expédiais quelques-uns de mes gens au Ka- ragoué : ils ne reviendraient pas de dix ans. J’ai assez de ces dissimulations, de ces déloyales pratiques ; et dussé-je aban donner tout ce qui m’appartient, je veux avant tout quitter les pays soumis aux princes’de race noire. Mtésa ne s’est pas mieux conduit que <Éamrasi; lui aussi retient prisonniers les porteurs d’un message amical, et je n’ose pas, à cause de ceci, faire ré clamer les fusils qu’il sait m’appartenir. Il m’est impossible de supporter plus longtemps une conduite pareille. » Kamrasi m’a fait répondre que mes alarmes étaient sans motif; que Bombay serait bientôt de retour, et que l’on me lais serait libre de partir aussitôt, car on n’a jamais prétendu me ré duire en esclavage. 29 octobre. — Une audience m’est accordée aujourd’hui dans le nouveau palais. J’y porte une Bible pour expliquer au monar- que certaines idées dont je l’ai entretenu déjà sur l’origine et la condition présente de cette race éthiopienne qui porte le nom de Vouahouma. Je remonte pour ceci jusqu’à la Genèse. Je lui raconte Adam, le déluge, la dispersion des peuples. Je lui montre, dans les chroniques, témoignage éclatant de la grandeur à la quelle ses ancêtres étaient parvenus, l’histoire de ce roi d’Éthio pie, nommé Zeraph, qui dans la vallée de Tsephath, près de Marésa, vint avec une armée d’un million d’hommes, combattre le juif Asa, chef de guerriers moins nombreux, et qui dut appe ler l’Ëternel à son aide. Passant ensuite à une époque plus ré cente, je lui fais voir les Éthiopiens aux prises avec les Arabes dans le pays des Somalis, puis à Omwita (Mombas), avec les