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469 BAHR-EL-ABIAD (LE NIL BLANC). dérober, de l’épaisseur des herbes, je me glissai à portée du trou peau et envoyai un coup de fusil à l’une des plus grosses, qui s’éloigna aussitôt en bramant. Les autres prirent l’alarme, se groupèrent et, humant l’air de leurs trompes simultanément relevées, finirent par vérifier, à l’odeur de la poudre, que leur ennemi était en face d’elles. Alors, remuant leurs trompes, elles se rapprochèrent de l’endroit où je me tenais abrité par un pli de terrain. Quand elles me flairèrent, leur marche fut aussitôt suspendue et, dressant la tête, elles nous regardèrent obli quement de haut en bas. La situation n’avait rien que de très- menaçant. Je ne pouvais me ménager le moyen d’en frapper aucune de façon à ce qu’elle tombât sur le coup, et si je différais d’un instant, nous pouvions être, moi et mon compagnon (le fils de Manoua) ramassés à terre ou foulés aux pieds. Aussi me hâtai- je de viser aux tempes, et, le coup ne s’étant pas trouvé mortel, je mis en fuite la bande tout entière, empressée à gagner pays plus vite qu’elle n’était venue. Ceci fait, je quittai la partie, attendu que je ne pouvais séparer de la troupe aucun des éléphants que j’avais blessés, et il me semblait cruel d’en frapper d’autres en pure perte. Toute réflexion faite, j’aurais dû employer plus de poudre : la petite taille de ces animaux, comparativement à celle des éléphants indous, me les avait trop fait mépriser, et j’avais chargé mon fusil comme s’il s’agissait de rhinocéros. Inquiétés par notre mousqueterie, mais n’y comprenant pas grand’chose, ils s’éloignèrent à peine et se remirent à paître. Là-dessus, grande histoire de Frij sur deux de nos déserteurs (Mlédi et Madi Lamadi) tous deux possédés du démon avant leur départ de Zanzibar. « Mlédi avait sacrifié une vache et secouru quelques pauvres, afin de conjurer les attaques des Mauvais anges; Madi Lamadi risqua, au contraire, le tout pour le tout. Le premier fut épargné; le second, en revanche, demeura sujet à des visitations plus ou moins néfastes, notamment dans l’Ousoui, où le Phépo (le démon) lui annonça un voyage prospère, pourvu qu’un de ses compa gnons fût mis à mort, et qu’un autre tombât malade. Et ceci se vérifia aux dépens de Hassani, qui périt sous les coups d’un as sassin, et de Grant, en butte aux attaques de la fièvre. Le diable apparut encore à Madi Lamadi dans le Karagoué. Ce fut pour lui dire que la vie d’un autre homme devait payer notre accès dans l’Ouganda. Le meurtre de Kari justifia cette prédiction. L’appari-