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453 BAHR-EL-ABIAD (LE NIL BLANC). voyez.... ce sont des femmes.... Ils se sauvent, tâchons de les rattraper!... » De mon côté, je ne cessais d’encourager mes hommes : — « Ne nous quittons pas, leur commandais-je inces samment.... Venez chercher de la poudre!... » Et je chargeais mon fusil à petit plomb, ce qui égaya Kasoro lui-même : — « Est-ce aux Vouanyoro, demandait-il, que vous destinez cette grenaille?... : —Comme à des pintades, » répliquai-je, et il éclata de plus belle. Malheureusement, je m’aperçus que ma flotte ne naviguerait pas longtemps de conserve. Un des bateaux, que j’avais pourvu de munitions, faisait force de rames pour se mettre hors de portée, sans s’inquiéter autrement de rester auprès de moi ; un autre préférait l’abri des roseaux et leur ombre pro tectrice à la pleine eau du milieu, que je regardais, quant à moi, comme plus favorable au jeu de nos mousquets. L’obscurité tou jours croissante ajoutait maintenant aux embarras de notre si tuation, et les Vouanyoro, que nous entendions sans les voir, gagnaient sur nous de quart d’heure en quart d’heure. Celle des barques qui cherchait, comme je l’ai dit, à se dérober le long des roseaux, fut l’objet de la première attaque; on lui lança des javelines qui, par bonheur, au lieu de frapper nos hommes, allèrent tomber dans l’eau. J’entendis ensuite le bruit des grap pins à l’aide desquels nos ennemis voulaient se saisir de leur proie : — « Au secours, Bana, au secours ! criaient mes gens ; c’est à notre vie qu’on en veut !... » — « En avant, en avant!... nous aurons bon marché de ces gens-là!... » Mais l’équipage que j’en courageais ainsi demeurait immobile et comme fasciné par la terreur. On aurait pu nous sabrer en détail, l’un après l’autre, sans rien changer aux dispositions de ces misérables Vouaganda, qui se bornaient à gémir et à répéter lâchement : — « N'yawo, N’yawo! (Mère! mère!) venez à notre aide! » Trois coups de fusil, partis de la barque harponnée, terminèrent alors le com bat. Les Vouanyoro se trouvèrent pris à leur propre piège. Deux de leurs hommes tombèrent, l’un tué, l’autre blessé. On les en tendit alors se dire que, « puisqu’ils n’avaient pas affaire à des Vouaganda, il valait beaucoup mieux ne pas insister, » et ils se retirèrent, en effet, nous laissant libres de remonter le fleuve sans nous avoir porté le plus léger dommage. Mais où donc était Bombay, pendant tout ce temps? Il ne nous rejoignit que beaucoup plus tard, et nous raconta, fort agité, ce