412 VOYAGE AUX SOURCES DU NIL. était déjà presque mort de faim, Kamrasi, refusant de le voir, lui a fait conseiller, s’il tenait à ses os, de reprendre le plus tôt possible la route par laquelle il était venu ; et cela motivé sur « la répugnance qu’inspire à ce prince toute communication avec les misérables bandits de l’Ouganda. »Me tournant alors du côté de Congow, je lui dis en plaisantant que « puisqu’on nous fer mait les routes de l’Ounyoro, il allait être chargé de me faire traverser l’Ousoga et le Kidi. » Cette perspective ne semblait pas autrement lui sourire, et le vaillant colonel me répondit en fris sonnant que c’était là une entreprise d’enfants perdus. 27 juin. — Par un motif quelconque, le roi n’a pas voulu se montrer, et nous nous sommes abstenus d’annoncer notre pré sence par des coups de fusil, afin de ne pas lui laisser croire que nos provisions de poudre sont inépuisables : ce serait le pousser à nous garder près de lui, jusqu’à ce que notre der nière charge y eût passé. J’ai constaté aujourd’hui, qu’à l’instar des Vouanyambo du Karagoué, les gens de l’Ouganda conservent à l’égard de Kamrasi des notions parfaitement absurdes ; ils lui attribuent le pouvoir surnaturel de séparer en deux les eaux du Nil, comme on dit que Moïse autrefois sépara les flots de la mer Rouge. 28 juin. — Mtésa nous a fait informer par un de ses jeunes messagers que, d’après des bruits récemment arrivés de l’Ou- nyoro, les « hommes blancs » sont encore au Gani et persistent à s’enquérir de nous; mais pas un mot de l’échec subi par Budja. Bombay est allé tout aussitôt loi porter notre réponse et lui an noncer que nos plans étaient complètement modifiés. Nous ne lui demandions plus qu’une grosse escorte qui nous permît de pousser jusqu’au Gani à travers l’Ousoga et le Kidi, attendu que tout retard dans nos communications avec Petherick pourrait compromettre l’avenir du commerce que nous voulons appeler vers l’Ouganda par la voie du Nil. Le roi nous a fait dire qu’il assemblerait demain tous ses officiers pour délibérer à ce sujet, et qu’il nous priait d’assisier à la réunion, tout disposé qu’il est à favoriser l’accomplissement de nos désirs. En attendant, nous avons vu passer un troupeau de, bétail,—quatre-vingts têtes environ — qui arrivaient, nous a-t-on dit, de l’Ounyoro ; ceci prouve que notre hôte, étranger à tout bon sens, compliquait de vols à main armée la négociation ouverte avec Kamrasi.