Volltext Seite (XML)
LE PALAIS DE L’OUGANDA. 361 une espèce de délégué ou de représentant qui sert à communi quer au roi de l’Ouganda les secrets du mystérieux abîme. Une fois à terre, on débuta par un pique-nique où le pombé ne fut point épargné; puis le cortège se mit à circuler dans une espèce de verger qu’il moissonnait gaiement, chacun paraissant animé des meilleures dispositions, lorsqu’une des femmes du roi — charmante créature, par parenthèse— eut la malheureuse idée, croyant lui être agréable, de lui présenter un fruit qu’elle venait de cueillir. Aussitôt, comme pris d’un a,ccès de folie, il entra dans la plus violente colère : >< c’était la première fois, disait-il, qu’une femme s’était permis de lui offrir quelque chose ; » et là-dessus, sans alléguer d’autre motif, il enjoignit à ses pages de saisir la coupable, de lui lier les mains, et de la faire exécuter sur-le- champ. A peine ces mots prononcés, tous les jeunes drôles à qui le le roi s’adressait, déroulèrent en un clin d’œil les turbans de corde'qui ceignaient leurs têtes, et, comme une meute de bas sets avides, ils se précipitèrent sur la belle créature qui leur était livrée. Celle-ci, indignée que de pareils marmots se crussent autorisés à porter la main sur sa royale personne, essaya d’a bord de les repousser comme autant de moucherons importuns, tout en adressant au roi des remontrances passionnées; mais en peu d’instants ils l’eurent saisie, renversée, et tandis qu’ils l’entraînaient, l’infortunée nous adjurait, le kamraviona et moi, de lui prêter aide et protection. Loubouga cependant, la sultane préférée, s’était jetée aux genoux du roi, et toutes ses compa gnes, prosternées autour de lui, sollicitaient le pardon de leur pauvre sœur. Plus elles imploraient sa merci, plus semblait s’exalter sa brutalité naturelle, jusqu’à ce qu’enfin, s’armant d’une espèce de massue, il en vint à la laisser retomber sur la tête de sa malheureuse victime. J’avais pris le plus grand soin, jusqu’alors, de n’intervenir dans aucun des actes arbitraires par lesquels se signalait la cruauté de Mtésa, comprenant de reste qu’une démarche de cet ordre, si elle était prématurée, produirait plus de mal que de bien. Il y avait toutefois, dans ce dernier excès de barbarie, quelque chose d’insupportable à ma nature britannique, et lorsque j’entendis mon nom(Mzoungou) prononcé d’une voix suppliante, je m’élan çai vers le roi, dont j’arrêtai le bras déjà relevé, en lui deman-