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LE PALAIS DE L’OUGANDA. 343 que j’ai eu l’occasion de le dire. L’officier placé à leur tête, exé cutant lui-même les ordres qu’il leur donnait, leur enjoignit de sauter et de louer le monarque. Celui-ci, s’adressant à moi d’un air de triomphe : « Vous voyez, me dit-il, que j’avais mis bien des soldats en campagne.... Yoilà une partie de mon armée qui revient, et le reste ne saurait manquer d’arriver au plus tôt.... Une fois mes forces réunies, je les enverrai combattre dans l’Ousoga. » Après quelques offrandes propitiatoires dont il serait superflu de parler ici, j’assistai au jugement d’une affaire criminelle. Les prévenus, amenés par une nombreuse escorte, étaient d’abord un vieillard qui autrefois, dans son beau temps, avait eu les deux oreilles coupées en punition de son excessive galanterie ; puis une jeune femme qui, après quatre jours de recherches, venait d’être découverte chez cet adorateur suranné du sexe le plus aimable et le plus trompeur. Le soin de prononcer sur leur sort était dévolu au jeune monarque. Celui-ci n’écouta guère que la plainte du mari, lequel raconta simplement la fuite de sa femme, les recherches auxquelles il s’était livré, sa surprise enfin en la retrouvant chez un homme dont elle aurait pu être la petite fille. Selon toutes probabilités, cette malheureuse avait quitté la maison du plaignant pour se soustraire aux mauvais traitements dont il la rendait victime, et sans doute aussi elle s’était bien gardée, en se réfugiant chez leur vieux voisin, de demander à ce dernier une autorisation formelle d’agir ainsi. Au reste, on ne peut savoir ce qu’ils auraient dit pour leur défense, car le roi ne leur laissa pas articuler une seule parole et, « pour empêcher, disait-il, le retour d’une si énorme inconvenance, » il les condamna tous les deux à mort. De plus, voulant ajouter à la sévérité de l’exemple, il prescrivit de les faire périr petit à pe tit, en prolongeant le supplice autant que possible, au moyen d’une opération qui consistait à couper chaque jour un de leurs membres, dont les vautours se nourriraient sous leurs yeux. Épouvantés de tant de rigueur, et réduits ainsi aux extrémités les plus désespérées, les deux misérables se débattaient pour se faire entendre ; mais on les entraîna au milieu de clameurs féroces qui s’unissaient, pour étouffer leurs voix, au bruit des tambours et des milélé. Deux secondes après, le roi ne pensait déjà plus à la