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342 VOYAGE AUX SOURCES DU NIL. Le roi, qui tenait un lever solennel, le premier depuis la nou velle lune, a planté là ses courtisans rasés de frais, pour me pro mener d’abord autour du n’yanza (étang) où il se baigne avec ses femmes, puis dans une jungle où les buffles sauvages se réfugient fréquemment parmi les roseaux papyrus, une espèce de torrent au lit fangeux. Nous n’en rencontrâmes cependant aucun, et revînmes goûter au palais, où on nous servit par ordre différentes sortes de fruits : entre autres le matungourou, capsule cramoisie pleine de graines acides qui, jusqu’à pré sent, a été reconnue seulement au bord des rivières et des eaux dormantes de l’Ouganda; puis le kasori, une variété de réglisse. La conversation allait et venait; le roi me demanda ma boussole, que je lui refusai de nouveau. Je voulus, mais en vain, lui démon trer le néant de sa croyance aux charmes et lui prouver que leur usage était une offense à Dieu. Pour mettre un terme à la dis cussion, il passa dans une autre enceinte du palais, où se trou vait la hutte qui lui sert de garde-robe. Un certain nombre de femmes adultes, absolument nues, y pénétrèrent sur ses pas pour remplir les fonctions ordinairement dévolues aux valets de chambre. En attendant qu’il fût prêt à tenir un second lever, nous restâmes assis en deux groupes à droite et à gauche de l’entrée, les « reines » d’un côté, moi et Bombay de l’autre. De là, nous nous rendîmes à la grande hutte du trône où, devant la cour assemblée à nouveau, commença l’expédition des affaires publiques. Comparut entre autres un officier nommé Mbogo (le Buffle) qui, lancé sans beaucoup de chances à la recherche de Petherick, nous raconta son voyage « réglé, nous dit-il, sur la marche du soleil levant. » Arrivé à la limite des contrées où l’homme se nourrit de bananes, il avait rencontré des peuples qui font de la viande leur aliment exclusif, ne connaissent pas l’usage du mbougou, et s’habillent de peaux ou d’étoffes, rempla çant d’ailleurs la lance par le simé ou poignard à double tran chant. Il donnait à cette nation le nom de Youasewé, à leur chef celui de Kisawa; mais l’assistance déclara unanimement que ce devaient être les Masawa ou Masai. On vit ensuite défiler environ quatre-vingts hommes dont le visage était noirci, et qui portaient sur la tête des bandelettes d’écorce de bananiers, à la main de longues baguettes en guise de lances, toute espèce d’armes étant prohibées à la cour, ainsi