Volltext Seite (XML)
328 VOYAGE AUX SOURCES DU NIL. mère) ;— et malgré ces appels déchirants à la pitié publique, pas une main ne se lève pour les arracher au bourreau, bien qu’on entende çà et là préconiser à voix basse la beauté de ces jeunes victimes. 26 mars. — Aujourd’hui, pour amuser le roi, je lui ai porté un dessin qui le représente sur son trône, présidant un lever solen nel. Chemin faisant, j’ai rencontré force bétail; c’est celui qu’on a capturé dans l’Ounyoro. Parmi les officiers dont l’antichambre était remplie, je me suis vu présenter l’oncle de la reine, Ma- simbi 1 2 , et un jeune général nommé Congow, lequel conduisit naguère dans l’Ounyoro, et jusqu’au delà du palais de Kamrasi, une armée victorieuse. Us m’ont toiis deux affirmé « qu’ils avaient obtenu l’autorisation de me recevoir, et attendent, disent-ils, avec impatience, la visite qu’ils ont lieu d’espérer. » Maintenant qu’il a un siège portatif, le roi se met volontiers à l’ombre dans un endroit de prédilection, .adossé aux palissades d’une cour intérieure. II était aujourd’hui d’une humeur bavarde, et mon dessin, montré à ses femmes, a produit le plus grand effet. Le roi ne demanderait pas mieux que d’en avoir d’autres, mais en même temps il me prie de lui prêter ma boîte à couleurs, qu’il veut, dit-il, examiner plus à loisir. — Dieu sait si jamais elle me sera rendue 1 . 27 mars. — Aussitôt après mon déjeuner, je suis allé voir Con- gow, qui était déjà chez le roi, comme à l’ordinaire. Masimbi se trouve également absent, et je profite de la circonstance qui m’a rapproché du palais de la reine pour solliciter l’honneur d’être admis chez Sa Majesté. Sous différents prétextes, tous plus ou moins futiles, elle m’a fait attendre, pendant une bonne partie de la journée, le moment où je pourrais lui parler. Tout en grommelant contre ces façons d’agir, j’ai fini, n’ayant rien de mieux à faire, par en prendre mon parti, dans l’espoir que tous ces délais aboutiront peut-être à quelque chose d’amusant. Derrière la couverture rouge qui me sert d’écran et abrite mon sommeil, j’entends enfin la reine qui se traîne lourdement et vient s’accroupir près de moi : « Le Bana, me dit-elle avec 1. Ce nom est celui qu’on donne, dans le pays, aux cauries ou coquillages servant de monnaie. 2. Malgré mes instances réitérées, je n’ai pu la r’avoir que bien plus tard, et lorsque j’étais à la veille de quitter l’Ouganda.