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322 VOYAGE AUX SOURCES DU NIL. repas chez la N’yamasoré, trouvent eux aussi porte close ? Quelles rations leur allouera-t-elle, etc.?Je cite ceci comme un excellent échantillon de la méthode suivantlaquelle se traitent les affaires, à la cour de l’Ouganda. On donne des ordres sans savoir com ment ils pourront être exécutés, et les arrangements indispen sables y sont négligés comme autant de détails inutiles, auxquels ne saurait se rabaisser la majesté souveraine. Mes Vouakoungou, cependant, ainsi que j’eus l’esprit de le de viner, faisaient le pied de grue dans la royale antichambre. Dès que je m’y présentai, les trois coups de fusil sacramentels me procurèrent une audience immédiate. Mtésa était assis à l’ombre, sur son fauteuil de fer, au milieu d’environ quatre-vingts femmes, tortillant entre ses doigts une baguette à fusil. Je débutai par lui proposer de l’échanger contre la mienne, qu’il semblait trou ver plus à son goût, et je lui offris ensuite un peigne d’écaille pour faire tenir ses cheveux droits sur leur racine, l’ayant en tendu mainte et mainte fois vanter à ses femmes la manière dont mes cheveux étaient disposés. Après ces préliminaires con- ciliatoires, je voulus aborder le sujet qui m’amenait, mais il me fut impossible d’obtenir que mes interprètes, — nonobstant tout ce que jedisais pour leur donner courage,—abordassent un sujet si délicat. » Ils ne l’osaient, prétendaient-ils, à cause des femmes dont nous étions entourés. » Impatienté de leur résistance, je m’adressai directement au roi pour lui demander, en langue kisouahili, un entretien particulier. Sans comprendre un seul mot de ma requête, il parut disposé à nous prêter quelque attention, et Maoula, le fin courtisan, tira parti de la circonstance pour l’entretenir du mousquet à six coups dont j’avais fait pré sent à Roumanika. Les éloges donnés à cette arme excitèrent bientôt la cupidité de Mtésa, qui fit appeler un page pour l’expé dier immédiatement au souverain du Karagoué, avec ordre de rapporter sans délai le fusil dont il convoitait la possession. « De quoi est faite la poudre? » me dit ensuite le roi. Et comme, au début de ma réponse, je prononçai le mot soufre (kibriti), l’im patient monarque m’arrêta court : — « Qu’on aille chercher du kibriti ! ? s’écria-t-il. - Le messager désigné partit à toutes jambes. Puis certains officiers qui attendaient le loisir du roi furent invités à s’appro cher, ce qu’ils firent en rampant sur leurs genoux et en détour-