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LE PALAIS DE L’OUGANDA. 287 de mbougou par des temps aussi froids que celui de la pré sente journée. Un refus n’était pas à prévoir, et nous dispo sâmes devant elle une couverture double en laine rouge, qui devint aussitôt l’objet de l’admiration générale : « Jamais, s’é criaient les spectateurs, cachant leur bouche derrière leurs deux mains, jamais si beau tissu n’est arrivé jusqu’à nous. Il traverse la hutte dans toute sa largeur; il monte plus haut qu’un homme ne peut atteindre; c’est véritablement une mer veille, et l’on doit estimer l’homme qui enrichit l’Uddou d’un pareil trésor. — Et pourquoi ne dites-vous pas l’Ouganda? m’empressai-je de demander. — Parce que, me répondit-on, le pays tout entier s’appelle Uddou. L’Ouganda est personnifié par Mtésa, et qui n’a pas été présenté à ce roi ne saurait se vanter d’avoir vu l’Ouganda. » Le ton de bonne humeur sur lequel la conversation était montée me parut permettre une discrète allusion au regret que j’éprouvais de ne pas vivre sur un pied de familiarité plus grande avec les naturels du pays.— « Les Vouaganda, disais-je, se met tent tous si bien que je ne puis distinguer les notables des gens vulgaires (mot à mot : les gros des minces). Ne pourrait-on rassu rer au moyen d’instructions formelles ceux qui hésitaient à me venir voir, et me permettre en revanche de leur rendre leurs visites? » La reine, dès qu’elle eut compris, se hâta de me pré senter à son premier ministre, à son chancelier de l’Échiquier, aux gardiens de ses femmes, à ses bourreaux et à ses cuisiniers, tous composant la haute aristocratie du royaume, afin que, venant à les rencontrer, je fusse en état de les reconnaître. Tous, émus de tant de condescendance, se livrèrent à des n'yanzig désordonnés, se déclarant d’ailleurs enchantés de leur hôte; ils exhibèrent ensuite une bande de joho 1 commun qu’ils compa raient à ma couverture, et me demandèrent si je connaissais cette étoffe : « Sans doute, répondis-je; elle se fabrique aussi t. Joho, corruption du mot arabe johh, drap grossier, écarlate ou bleu. Il se vend, à Zanzibar, cinquante cents ou un demi-dollar le yard (quatre-vingt-dix centimètres). Dans l’intérieur, il s’élève rapidement à une valeur beaucoup plus considérable, et devient un présent digne d’un prince ; il se porte en soukkah de quatre coudées, autour des hanches par les hommes, et autour de la poitrine par les femmes qui en veulent souvent une tobé ou double longueur, c’est-à-dire huit coudées.