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284 VOYAGE AUX SOURCES DU NIL. des présents que j’apportais et qui furent universellement admirés. Après quoi la reine, se sentant bon appét't et jugeant de mes dispositions d’après les siennes, me proposa d’aller prendre mon repas dans une des cabanes voisines. Je m’y rendis aussitôt, fis dresser ma couchette, et commandai mon dîner; mais comme la hutte se trouvait envahie par une foule d’assis tants, j’étendis entre eux et moi mon plaid d’Ecosse, éclipsant ainsi les rideaux de mbougou derrière lesquels la N’yamasoré se dérobe parfois à une curiosité importune. Le bruit de cette magnificence parvint immédiatement à la reine, et on vint, par son ordre, me demander « si je possédais beaucoup de couvertures pareilles, et si je voudrais bien, à sa requête, lui en offrir une?» Elle témoigna également le désir d’exa miner mes cuillers, ma fourchette et ma pipe, — un kummer anglais monté en argent. L’exhibition de tous ces objets eut lieu après le déjeuner, mais je dus lui dire qu’en fait de couvertures il ne me restait absolument que celle de mon lit. Elle ne mani festa aucun désappointement, et, sans insister le moins du monde, se mit à fumer avec moi. — « J’avais visité, lui dis-je, les quatre parties du monde et j'avais vu des gens de toutes couleurs, mais j’ignorais absolument d’où pouvait lui venir sa pipe, qui, vu la longueur du tuyau, ressemblait à celles des Roumish (c’est le mot par lequel on désigne les Turcs). » Agréablement chatouillée par cette flatterie : — « Nous avons entendu parler, dit- elle, de gens qui nous ressemblent et qui, pénétrant dans l’Amara par le côté opposé, viennent y enlever le bétail. — 11 est possible, répliquai je, que les Gallas ou Abyssiniens, lesquels ont la haute taille et la peau blanche de Roumanika, se livrent quelquefois à de pareilles expéditions; ils sont en effet assez voisins de l’Amara, dans la direction que vous in diquez ; mais nous ne faisons jamais la guerre dans un but si mesquin. Le bétail que le hasard des combats place entre nos mains, nous le laissons manger par nos soldats; ce qu’il nous faut, à nous, c’est le gouvernement des pays vaincus. — On nous a dit, reprit-elle, que la route de l’Ounyamouézi ne vous convient pas; nous vous en ouvrirons une autre dans l’Oukori. » Tout en la remerciant, je voulais, avec les ménagements de rigueur, lui bien faire comprendre qu’un pareil projet devait