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LE PALAIS DE L’OUGANDA. 265 échanger une parole; réduit pour ma part à un silence complet, je l’entendais discourir avec ses voisins sur la nouveauté de mon appareil, l'uniforme de ma garde, etc. On vint même me de mander en son nom, pendant qu’il se livrait à ces commentaires, tantôt d’ôter mon chapeau, tantôt de refermer et d’ouvrir mon parasol, et mes gardes reçurent ordre de se retourner pour qu’on pût admirer leurs manteaux rouges, l’Ouganda n’ayant jamais rien vu de pareil. Enfin, comme le jour baissait, Sa Majesté m’expédia Maoula, qui vint s’informer « si j’avais vu le monarque? » Je répondis que je prenais ce plaisir depuis une heure entière, et dès que ces paroles lui eurent été transmises, il se leva, la lance à la main, pour se retirer, avec son chien qu’il tenait en lesse, dans les huttes de la quatrième enceinte. Le jour étant consacré à un lever de pure étiquette, aucune affaire ne devait être traitée entre nous. La démarche du roi, au moment où il prenait ainsi congé de nous sans la moindre cérémonie, devait, paraît-il, nous sembler majestueuse. C’est une allure traditionnelle de sa race, qui, au dire des flatteurs , rappelle le pas du lion. Je dois con venir, cependant, que cette manière de jeter la jambe à droite et à gauche me faisait songer au dandinement maladroit des pal mipèdes de basse-cour, et loin de me frapper de terreur, m’em pêchait de prendre Sa Majesté tout à fait au sérieux. Un nouveau délai m’était imposé, mais l’humanité cette fois ne me permettait pas de m’en plaindre ; on m’avait révélé, sous le sceau du secret, que le roi, lié par son serment de ne pas rompre le jeûne avant de m’avoir vu, venait d’aller prendre son premier repas. Dès que cette réfection fut achevée, nous pas sâmes à une autre exhibition des splendeurs de sa cour. Je fus invité à l’aller trouver avec tous mes hommes,—ses propres offi ciers, à l’exception de mes deux guides, restant exclus de cette audience particulière. Il était debout sur une couverture rouge, adossé à l’une des portes de la hutte, causant et plaisantant, mouchoir en main, avec une centaine de ses femmes vêtues de mbougou neufs, et qui, partagées en deux groupes, s’étaient accroupies à ses pieds. Mes gens n’osaient pas avancer tête levée, encore moins risquer le plus léger coup d’œil du côté des femmes; courbés en deux, le nez à terre, le regard oblique, ils rampaient derrière moi. Ne me doutant guère du sujet de leurs