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262 VOYAGE AUX SOURCES DU NIL. lancer hors de son cabinet de toilette et de courir après moi. Mais comme je marchais fort vite et que j’étais déjà loin, il changea d’avis et me dépêcha un certain nombre de Vouakoungou. Ces pauvres diables, galopant de leur mieux, finirent par me rejoindre, et me supplièrent, agenouillés, de revenir au plus vite, « attendu que le monarque, à jeun depuis la veille, ne voulait manger qu’après m’avoir vu. - Leurs touchants appels, dont je ne comprenais pas un traître mot, me causaient cependant une cer taine émotion ; j’y répondis en posant la main sur mon cœur et en secouant la tète d’un air pénétré, — mais je n’en marchai que plus vite. A peine dans ma hutte, j’y vis arriver, tout en nage, Bombay et plusieurs autres de mes hommes, chargés de m’apprendre que mes plaintes avaient été portées devant le roi. Le hongo de Sou- warora était ajourné jusqu’à nouvel ordre; et, dans son désir de me témoigner tous les égards qui m’étaient dus, le roi m’auto- . risait à faire apporter avec moi mon propre siège, bien que ce fût là un des attributs exclusifs de la royauté. Ayantainsi ville gagnée, je me calmai à loisir par le moyen d’une pipe et d’une tasse de thé. Ce qui me touchait le plus dans ma victoire était l’humiliation de Souwarora. Lorsque je reparus dans la seconde enceinte que je venais de quitter, j’y trouvai une agi tation et un trouble extraordinaires, personne ne sachant au juste quelles pourraient être les conséquences d’une témérité comme la mienne. Les maîtres des cérémonies me supplièrent, avec les formes les plus courtoises, de m’asseoir sur le tabouret pliant que j’avais apporté; d’autres officiers se hâtèrent d’aller annoncer mon retour. Je n’attendis pas plus de quelques mi nutes, pendant lesquelles les musiciens, vêtus de peaux de chè vre à longs poils et dansant à peu près comme les ours de la foire, s’efforcèrent de charmer mes loisirs. Ils jouaient, pour la plupart, sur des instruments de roseau enjolivés de verroteries, et auxquels pendaient, en manière de pavillons, des peaux de chat-pard; la mesure était battue sur des tambours de forme oblongue. On m’annonça bientôt que le tout-puissant monarque siégeait sur son trône dans la hutte de cérémonie, située au centre de la troisième enceinte. Je m’avançai donc, le chapeau à la main, suivi de ma garde d’honneur, à qui j’avais ordonné d’ouvrir les