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LE PALAIS DE L’OUGANDA. 261 La première cour une fois franchie, les exigences de l’étiquette semblèrent se compliquer. Les grands officiers venaient me sa luer, chacunà son tour, en habits de fête. Des groupes d’hommes, de femmes, de taureaux, de chiens et de chèvres défilaient de tous côtés, et les petits pages, avec leurs turbans de corde, pas saient en courant comme si leur vie eût dépendu de la prompti tude avec laquelle serait rempli le message dont ils étaient por teurs; pas un d’eux, toutefois, qui n’eût soin de tenir bien clos son manteau de peaux d’antilope, afin de ne pas laisser entrevoir un seul instant ses jambes nues. La couroù nous étions maintenant précède celle des réceptions, et il m’eût semblé naturel d’entrer sous la hutte où se tenaient les musiciens, qui tous, en chantant, jouaient de l’harmonica et de harpes à neuf cordes, pareilles à la tambira nubienne ; mais les maîtres des cérémonies, qui s’obstinaient à nous mettre sur le pied des trafiquants arabes, me requirent de m’asseoir à terre en dehors de cette hutte, avec tous mes gens. Or, j’étais bien résolu à ne pas suivre, à cet égard, l’exemple des indigènes et des Arabes, encore que ceux-ci m’eussent averti qu’ils n’avaient pas osé enfreindre les usages de la cour. Je comprenais fort bien que, faute d’affirmer mon indépendance et ma valeur sociale, je perdrais pour tout le reste de ma visite les avantages que m’a vaient donné jusqu’alors ma supériorité sur le commun des trafi quants et le rôle princier dont je revendiquais les privilèges. Cependant, — pour éviter le reproche de précipitation, et vu la crainte que manifestaient mes serviteurs en me trouvant si re belle aux prescriptions de l’étiquette, —j’accordai cinq minutes de réflexion aux gens de la cour, les prévenant que faute d’un ac cueil plus convenable, je me retirerais à l’expiration de ce délai. Les Youaganda, stupéfaits, ne bougeaient non plus que des poteaux. Mes gens, qui me connaissaient homme de parole, com mençaient à me croire perdu. Les cinq minutes écoulées, ne voyant rien changer à l’ordre établi, je repris le chemin de ma hutte, après avoir enjoint à Bombay de me suivre, en laissant déposés à terre les présents que nous avions apportés. Bien que lesouverain soitréputé inaccessible, — si ce n’est lors des occasions assez rares où il lui passe par la tête de tenir cour plénière, — il apprit sans retard que je venais de m’éloigner dans un transport d’indignation. Son premier mouvement fut de s’é-