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178 VOYAGE AUX SOURCES DU NIL. temps s’écoulait avec une rapidité merveilleuse durant ce pre mier entretien ; mais, comme le jour baissait, il fallut songer à notre installation, et, profitant de l’option qui nous était laissée, nous allâmes nous établir, à l’extérieur du palais, dans un en droit ayant vue sur le lac, dont l’aspect nous avait charmés. Un des jeunes princes, à qui on avait recommandé de veiller sur nous, ne m’eut pas plutôt vu installé dans mon fauteuil de fer, qu’il courut rendre compte à son père de cette nouveauté merveilleuse. Ceci me valut une invitation à me rendre sans re tard au palais pour montrer « l’homme blanc » sur son trône, et dans tout l’appareil de la dignité royale que me conférait un siège si honorable. J’obéis quelque peu à regret, dédommagé cependant par la joyeuse admiration de mon hôte, par son in telligente curiosité, par la confiance enfin qui s’établissait entre nous :—« Oh! ces Vouazungoü, ces Vouazungou, s’écriait-il avec un hochement de tête significatif, que ne savent-ils pas et que ne peuvent-ils accomplir! » Je profitai de l’occasion pour glisser un mot contre les préju gés superstitieux par suite desquels les Vouahouma nous refu saient du lait'. Le roi me répondit que « ces idées avaient exclu sivement cours parmi les classes pauvres,' et qu’il mettrait bien volontiers à notre service le produit quotidien d’une de ses va ches.» En rentrant au camp où ce prince, si rempli d’égards, ve nait d’envoyer un supplément de son excellente bière, je trouvai les Vouangouana dans un état de liesse complète. Les chèvres, la volaille arrivaient à chaque instant, par suite des ordres expé diés de tous côtés pour que les hôtes du roi ne manquassent de rien, et nos approvisionnements se renouvelèrent ainsi pendant un mois de suite, mais sans diminuer beaucoup ma dépense quo tidienne (en rassades, bien entendu), car on négligeait assez volontiers de nous pourvoir de grain et de bananes. Les vents froids, d’ailleurs, faisaient grelotter nos gens de la côte, et dans leur ignorance naïve, ils se croyaient tout près de l’Angleterre, le seul pays hyperboréen dont ils eussent jamais entendu parler. 26 novembre. — Ayant ouï dire qu’il serait inconvenant de brus- 1. Ils craignent, à ce qu’il paraît, pour leur bétail l’influence funeste de qui conque ayant mangé soit du porc, soit du poisson, soit de la volaille, soit une espèce de fève appelée maharagoué, viendrait ensuite à boire le lait de leurs vaches.