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126 VOYAGE AUX SOURCES DU NIL. saire assez courageux pour aller de ma part chez Souwarora; et même si j’échouais en ceci, je n’en poursuivrais pas moins mon-dessein, retournant s’il le fallait jusqu’à Zanzibar pour y chercher les compagnons qui me manquaient. » Cet appel ne l’émut pas autrement; mais, sans répliquer un mot, il procéda d’un air boudeur au tirage de l’escorte qui devait me ramener à Kazeh. Les plaintes, les récriminations éclatèrent alors de toutes parts. Pas un des volontaires ne consentait à marcher. Revenant sur leurs anciens griefs, ils me reprochaient de payer les « engagés à temps » plus cher que l’escorte per manente. — Ils étaient,disaient-ils, la chair, et je jouais le rôle du couteau, taillant et coupant à merci dans tous les sens, ce qu’ils ne pouvaient tolérer plus longtemps.... Je les mis pour tant à la raison, et confiant à Baraka le soin de veiller sur ma tente aussi bien que sur mes marchandises, je rebroussai che min, rapportant à Kazeh un mauvais rhume, résultat de ces froids vents d’est qui soufflent sur le plateau pendant les six mois de sécheresse, et qui doivent être, —je le suppose du moins, —le Harmattan particulier à l’Afrique. Grant, que je retrouvai le lendemain, avait réuni quelques hommes du Sorombo et se préparait à marcher sur mes traces. Je lui fis part de ma mésaventure et de mes anxiétés qui étaient fort grandes. Je ne savais dans le fait à quoi me décider. Toute autre ressource venant à me faire défaut, je songeais à construire un radeau sur la pointe méridionale du N’yanza, et à tâcher de remonter ainsi jusqu’au Nil. Mon agitation d’esprit ne me laissa pas jouir longtemps du plaisir de causer avec Grant, et me fai sant suivre de Bombay, je continuai ma route vers Kazeh. A Mbisou, chez Mchimika, je rencontrai le « Pourceau » qui re grettait, me dit-il, de n’avoir pas accepté mes offres. Baraka et les Vouangouana l’avaient seuls empêché de partir, à force de menteries. Désabusé maintenant, il offrait de braver, en compa gnie de Bombay, les périls de la mission que j’avais voulu lui confier. La proposition avait ceci de séduisant, qu’elle me dis pensait de continuer péniblement mon chemin vers Kazeh. Mais, après avoir été si souvent dupé par cet homme, je ne pouvais en aucune façon me üer à lui, et il me fallait absolument un guide moins disposé à prendre contre moi le parti des chefs indigènes. Sirboko, chez qui je passai la journée suivante, jugeait assez pra-