Volltext Seite (XML)
122 VOYAGE AUX SOURCES DU NIL. doigts toutes les fois qu’il lui arrivait d’éternuer. Après les premiers compliments, je lui donnai, comme gage d’amitié, en échange du bouvillon qu’il m’amenait, un barsati supplémen taire, et je lui demandai compte de ce qu’il avait vu quand il était allé dans le pays des Masai. Je tirai de lui l’assurance qu’il s’y trouvait non pas un seul, mais deux lacs distincts ; car en passant de l’Ousaga dans le pays en question, il avait traversé un détroit considérable qui reliait le grand N’yanza et un autre moins étendu, situé à l’angle nord-est du premier. « A présent que j’ai répondu à vos questions, ajouta-t-il aus sitôt avec son impétuosité ordinaire, montrez-moi tout ce que vous avez; je veux tout voir de bonne amitié. Si je ne vous ai pas reçu le premier jour, c’est qu’il fallait, à cause de votre qualité d’étranger, vérifier, au moyen de la corne magique, si votre pré sence devait ou non causer aucun malheur. Je puis bien vous dire, maintenant, que non-seulement je n’ai rien à craindre de vous, mais de plus que votre voyage s’accomplira sans encombre. Je suis en vérité charmé de vous voir, attendu que ni mon père, ni aucun de mes ancêtres n’ont jamais été honorés de la société d’un homme blanc. » Mes fusils ensuite, et mes étoffes, et tout mon bagage, fut passé en revue de la manière la plus indiscrète. 11 voulut voir mes albums, contempla les oiseaux avec un plaisir extrême, et pré tendait insérer sous leur plumage ses ongles, d’une longueur toute royale ou toute chinoise. Ces chefs les laissent croître ainsi pour montrer qu’ils ont le droit exclusif de se nourrir de viande. Makaka, devant chaque animal, poussait des cris de joie et le dé signait par son nom. Ma lanterne sourde lui inspirait de tels désirs qu’il fallut se fâcher tout rouge pour mettre un terme à ses importunités. Ce furent ensuite mes allumettes qui le char mèrent, au point que je ne savais comment me débarrasser de ses instances. Je finis par lui offrir un couteau à la place de la boîte qu’il convoitait; mais il refusa, sous prétexte que les allumettes lui seraient, pour ses opérations magiques, d’une utilité toute particulière. La discussion continua jusqu’au moment où je le mis à la porte avec une paire de pantoufles à moi, dans laquelle il avait fourré, sans ma permission, ses pieds fangeux. Je refusai aussi de garder son bouvillon, pour lui témoigner à quel point il m’avait froissé. En revanche, il était décidé à ne pas faire bat-