CHAPITRE XIII. 67 gouvernent et Y avilissement de ceux qui sont gouver- ne's, m’ont de'goûté de la vie ; et quand il n’est de choix que d’être complice ou victime de l’oppression, que reste- t-il h l’homme vertueux, que de joindre sa cendre à celle des tombeaux ! » Et le Génie, gardant le silence, me fixa d’un regard sévère mêlé de compassion; et, après quelques instans, il reprit : « Ainsi, c’est à mourir que la vertu réside ! L’homme pervers est infatigable à consommer le crime, et l’homme juste se rebute au premier obstacle à faire le bien!.... Mais tel est le cœur humain; un succès l’enivre de confiance, un revers l’abat et le consterne : toujours entier à la sensation du moment, il ne juge point des choses par leur nature, mais par l’élan de sa passion. Homme qui désespères du genre humain, sur quel calcul profond de faits et de raisounemens as-tu établi ta sen tence? As-tu scruté l’organisation de l’être sensible, pour déterminer avec précision si les mobiles qui le portent au bonheur sont essentiellement plus faibles que ceux qui l’en repoussent? Ou bien, embrassant d’un coup d’œil l’histoire de l’espèce, et jugeant du futur par l’exemple du passé, as-tu constaté que tout progrès lui est impossi ble? Réponds ! depuis leur origine, les sociétés n’ont-elles fait aucun pas vers l’instruction et un meilleur sort? Les hommes sont-ils encore dans les forêts manquant de tout, ignorans, féroces, stupides? Les nations sont-elles encore toutes à ces temps où, sur le globe, l’œil ne voyait que des brigands brutes ou des brutes esclaves? Si, dans un temps, dans un lieu, des individus sont devenus meil-