Or il ne fut pas long-temps que les Sauuages prirent plufieurs Eslans, defquels ils en dedierent un pour nos pauures Religieux de Kebec, qu’ils enuoyerent ad- uertir par un de leurs hommes pour le venir quérir à dix ou douze lieues de Kebec. Le P. Irene'e y voulut aller auec noftre bon frere Charles, & quelque * François que leurprefta le heur de Champlain. Il faifoit pour lors un très grand froid, le temps fort ferain, & la terre partout couuerte de cinq ou fix pieds de neiges, c’eft ce qui les contrai gnit après auoir faiét prouifion d’un peu de galettes pour viure en chemin, de s’accommoder chacun d’une paire de raquettes attachées fous leurs pieds pour 102 n’enfoncer dans les'neiges, & auec cela ils fe || mirent à la fuitte de leur Saunage qu’ils ne perdoient point de veuë, à caufe qu’il n’y a aucun fentier ny chemin en tout le pais. Mais comme il alloit un peu trop vifte pour de pauures Religieux & n’auoit pas la difcretion de con- fiderer que nos habits nous font fort incommodes à marcher pendant les vents & le mauuais temps, le Pere ordonna qu’il iroit le dernier & le plus mauuais marcheur le premier, & auec ceft ordre ils allèrent plus commodément & allègrement. En tout le chemin ils ne trouuerent ny maifon ny tauerne pour fe chauffer, & pour leur nourriture il fallut fe contenter d’un peu de leur galette, car il la falloit ménager, pour qu’il en reftat iufques à la fin du voyage. La réception que leur firent les Sauuages eftoit plus accompagnée de complimens que de bonnes viandes, car eftant iour de ieufne, il leur fallut aller